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Une femme à Berlin

1924285668.jpg… Mais pas n’importe quelle femme, puisqu’elle a tenu à rester anonyme.
Pas n’importe quand, surtout, puisque ce journal démarre en avril 45 pour se terminer deux mois plus tard.
Petit rappel pour situer le décor : en avril 45, les Berlinois se terrent dans les caves, pris dans une tenaille verticale entre les alliés dans les airs (doctrine anglaise : faire un maximum de victimes civiles pour hâter la capitulation) et les Russes au sol, bien décidés à violer tout ce qui bouge pour se venger des atrocités des SS et tirer leur coup comme des gros bourrins.
Sans recul (et surtout sans la pose complaisante des documents écrits après coup), ce journal décrit au jour le jour une expérience humaine limite. La première partie concentre ce qu’on peut imaginer de pire : la famine, les pillages, "l’épidémie de viols", la peur, les mesquineries, ces officiers russes dont on accepte les saillies pour éviter celles de leurs hommes. Et malgré ça, le blindage :

"Quelles que soient les formules ou les bannières auxquelles les peuples se rallient, quels que soient les dieux auxquels ils croient ou leur pouvoir d’achat : la somme des larmes est constante. Les populations gâtées se vautrent dans la satiété. Ceux auxquels le sort a infligé un excès de souffrances, comme nous aujourd’hui, ne peuvent s’en sortir qu’en se blindant. Sinon, j’en viendrais à pleurer jour et nuit. Or, je le fais tout aussi peu que les autres."

(C’est l’un des quelques passages où l’auteur prend de la distance. La plupart du temps, c’est plutôt Youpi j’ai pu me faire une soupe d’orties, jusqu’à ce : "Moi-même, j’attends le moment où pour la première fois j’ôterai le pain de la bouche d’un plus faible." Et deux pages plus loin, pourtant, une ouvrière qui donne son pain à un prisonnier affamé)

La deuxième partie, une fois la paix revenue, est plus fascinante encore – une fascination plus raisonnée, de voir comment dans des ruines (celles des habitants comme des bâtiments) la vie reprend finalement très vite, comme un miracle : les rues qu’on déblaie, les cartes d’alimentation, l’eau qui revient, l’électricité aussi et avec elle la distance entre voisins, l’organisation, les journaux qu’on punaise dans les rues, le premier tramway qui passe, un avenir qui commence à se dessiner…
… Et un livre qui se finit trop tôt, mais c’est ça aussi, la vraie vie. Et les bons livres.

- Dis-donc, t’as des lectures marrantes, toi, en ce moment !
- Peut-être... C’est pour mieux être joyeux à l’extérieur.
- Ah ! OK. A bientôt alors ?
- A bientôt

Commentaires

  • ça va c'est vendredi vous pouvez y aller avec les lectures pas marrantes et toute la misére du monde, nous ne pensons qu'au week end, grasse mat et tout le toutim :)

  • On ne parle pas assez de la guerre du point de vu des allemands quand on vit en France.
    Comme le dit le proverbe, c'est les gagnants d'une guerre qui écrivent son histoire.

  • C'est vrai que ça relativise, "quand je m'estime je me désole, quand je me compare je me console"... M'en vais chercher ton bouquin, tiens, parce que Cendrillon, pour être poli, disons que ça pisse pas loin, en fait...

  • Très bonne critique, vous m'incitez à le lire.

    Accent Grave

  • On n'a jamais parlé ensemble de "Récits de la Kolyma" de Chalamov il m'a semblé.
    (F., chut).

  • Cette note me donne l'envie de lire ce que je ne voulais plus lire...
    Merci.

  • Tu as raison, moi aussi les "désastres" me donnent envie de vivre, de chanter, de danser, et de sourire.
    Quant à la vieille du temple... n'en parlons plus.

  • > a@t : vous verrez ce que je vais mettre quand il fera enfin beau...

    > Orange fluo : (bienvenue!) exact. et sur cette période, il est encore compliqué d'adopter un autre point de vue. mais passionnant.

    > Castor : on pisserait donc moins loin quand on se regarde pisser ? ;)

    > Accent Grave : ... je vous y enjoindrais, presque !

    > E-cédric : ah non, en effet... du genre poilant, j'imagine ?

    > E : tiens bon! qualité garantie ;)

    > LVS : en attendant d'aller voir Primo L.
    (la vieille du temple... je savais que tu la retrouverais)

  • le "blindage", c'est la technique coach suprême ça...

  • Hé hé...
    (Mais le meilleur blindage, c'est parfois l'absence de blindage)

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