On m’avait déjà prévenu, que ce festival était spécial. Je m’en suis rendu compte dès le départ. 7h du matin, gare Montparnasse, et pas un écrivain pour râler – j’ai cru un instant que je m’étais trompé de quai.
Dans le train derrière moi, une inconnue évoquait ses dernières productions. J’écris aussi de petites formats courts qui plaisent beaucoup, disait-elle.
Dans le silence des siestes matinales montait aussi, depuis le siège de devant, la voix de Maylis de K., aussi incroyablement douce que sa plume peut être tranchante. Quand je t’ai connu, tu semblais triste, confiait-elle à son voisin ; je pensais que c’était cette soudaine médiatisation…
Je suis resté sagement à ma place, mais j’avais choisi mon camp.
Un petit tour sur les remparts de Saint-Malo, et zou, vers 14 heures commençait vraiment le salon.
Je vous épargne les détails, mais en vrac, on retiendra l’accueil de la Droguerie de Marine (au plaisir!), les sourires bretons sur le stand, l’énergie tranquille d’Oxmo Puccino en milieu d’après-midi, les bonnes ondes charriées de bout en bout par les allées du festival, quelques lecteurs venus "spécialement pour vous" et d’autres, plus nombreux, arrivés là par hasard, attirés par une couverture, un titre ou des regards qui se croisent en silence, les bonnes ondes, toujours, et le plaisir étrangement renouvelé de la dédicace. Les yeux grands ouverts de David Vann, et le coucher de soleil au bord de l’eau. Manon Loizeau et les étudiants iraniens, un lundi matin, pour se sentir tout petit mais gonflé d’énergie. Le Muscadet, bien sûr, Madame France et Monsieur Robert, une grande blonde au comptoir et une petite brune au téléphone. L’Amérique et l’Afrique autour d’une douzaine d’huîtres. Et pour compléter le tableau, trois marins polonais s’effondrant en pleine rue vers 21 heures.
Bon, ok, il y avait aussi un dimanche. Avec sa double gueule de bois. Ainsi donc, B.a.-ba n’a pas eu le prix du livre Ouest-France, ce n’est qu’après coup qu’on apprendra qu’il s’en est fallu de peu face à Yahia Belaskri. Salutations tout de même aux jeunes membres du jury : c’était rafraîchissant de causer avec eux. Je suis à peu près sûr qu’à 18 ans, un sujet comme l’alphabétisation me serait passé bien au-dessus de la tête…
Heureusement, entre deux aspirines et trois mouchoirs ce dimanche, il y a eu cette rencontre, salle pleine, avec l’italien Fabio Geda. Sujet du jour : les parcours des migrants (il a écrit l’histoire d’un jeune Afghan arrivé en Italie après 5 ans de fuite – lecture en cours), les cultures qui se mélangent (on en reparle), l’Européen du futur… et le football. Fabio me raconte qu’il joue dans "l’équipe nationale des auteurs italiens". Ha! Un championnat d’Europe est prévu en 2012. La France n’a pas d’équipe, paraît-il. Elle en aura bientôt une, je vous le dis.
… Puis c’était déjà lundi soir. Un dernier verre d’eau, quelques idées de livres, des adresses mail notées sur des carnets de voyage et des promesses de revoyure. Et un dernier mot avant de monter dans le car avec Wilfried N’Sonde, qui faisait partie du comité de lecture du prix. Avec ce résumé lumineux : Si tu peux écrire une fiction avec l’énergie de B.a.-ba…
Simple comme bonjour…
Ça fait parfois bizarre, une évidence.
Allez, salut.
Commentaires
Décidément, la Pologne s'effondre souvent...
seulement la 2e année où j'y suis allée, mais je dois avouer que moi aussi je ressens quelque chose de spécial à ce festival, de mon statut de lectrice.
à mon retour dimanche soir, des amis présents m'ont trouvé "défoncée à la littérature", j'ai trouvé ça drôle et pas forcément faux. ce n'est pas un sentiment que j'ai eu à d'autres salons du livre, juste celui-là, et deux années d'affilée.
j'ai eu une discussion ce week-end avec mon ancien prof de français qui m'accompagnait sur les livres qui touchaient de près ou de loin à l'enseignement. Pour lui, c'est rebutant pour les élèves comme pour les profs, trop proche de "notre" monde. je ne regrette pas cependant d'avoir acheté B.a.-ba, les exceptions existent. ce n'est pas le prix ouest france non plus (j'ai acheté le roman de Yahia Belaskri pour le lire, par confiance en ce jury de jeunes de mon âge), mais ce n'est pas grave, même pour toi : ce n'est que ton 2e roman, tu as le temps avant de recevoir des prix.
et pour "l'évidence", je te fais confiance pour la mettre en pratique à l'avenir.
à bientôt.
Que deviendrait l'adage saoul comme un polonais si... ?
Maylis de K. ? Tu lui a demandé où était passé l'exemplaire du Castor j'espère ?
Désolée pour l'absence de trophée, mais ravie de savoir que tu reviens dopé d'énergie. Et que tu as rencontré Fabio Geda.
> Fashion : ... et ce n'est pas faute d'être solidement bâtie.
> Constance : merci ! ;)
Tu sais maintenant que je suis champion des pronostics.
A bientôt, oui, et bon courage pour les épreuves avant le compte-rendu voyageur. (tiens, au fait - ton auteur interviewé, il ne viendrait pas de l'autre côté de l'Atlantique ?)
> Cécile : c'était un adage vivant (enfin, tout juste)
Maylis avait tout plein de ponts devant elle, impossible de savoir lequel était à qui...
non, loupé. un indice : c'est quelqu'un auquel tu aurais pu être associé si tu avais eu le prix (précédent lauréat ? membre du jury adulte ? ...).
L'autre côté de l'Atlantique, à part un québécois, j'aurais eu du mal à l'interviewer : je suis une quiche en anglais malgré tous mes efforts
Rien qu'à vous lire me manque le bar de l'Univers, les nuits arrosées, les chants irlandais, les fruits de mer et toutes ces rencontres pleines de chaleur humaine et de littérature.
> Constance : le Ouest France de lundi évoquait la présence du précédent lauréat... mais je ne l'ai pas vu! le mystère reste entier.
(et cette philo, alors?^)
> C. Sauvage : ... et les couchers de soleil, et les livres/films qu'on n'aurait jamais vus/lus! un festival où il fait aussi bon arpenter les allées en visiteur que discuter derrière les tables...
(salutations!)
Oui même si la pluie tombait à l'envers on se lasse jamais de ces brethonneries littéraires :)
ce n'est pas le précédent lauréat, même si j'ai croisé Martin Page dans les allées le dimanche après-midi. il partait en soirée. en fait, je crois que presque tous les précédents lauréats étaient là, en fait.
ça donne envie…
(pour l'équipe de foot, je veux bien faire partie du banc de touche, tenir les bombes refroidissantes, relancer le ballon quand il part dans les tribunes, enfin, bref, je veux bien participer) (jouer, j'adorerai, mais ça va être moins facile et pas forcément un atout)
> Gondolfo : hé hé... une vraie douche, le dimanche, puis les rayons de soleil ^
> Constance : "Martin Page partait en soirée", j'aime bien cette phrase ! ;)
Et sinon... l'auteur mystère serait-il/elle monté(e) sur scène ? (NB - je viens de voir dans le rétro une très belle sélection 2007)
> Ficelle : nous aurons à coup sûr besoin de supporters et de soutien logistico-technique! (welcome ;)
je crois que tu as deviné : lauréat 2007, elle est montée sur scène pour faire une magnifique lecture d'un extrait du livre lauréat. mais chut, les lecteurs de mon blog n'ont encore rien deviné sauf quelques-uns par une série de mails ;)
et du coup ce voyage avec Brando S : il est aussi sympathique qu'il en a l'air ?
Il l'est !
(quant à la lauréate mystère: je me suis demandé si elle connaissait Y. Belaskri, ou son livre, avant cette lecture...)
je ne crois pas qu'elle le connaissait et je ne crois pas non plus qu'elle ait lu son livre : pas le temps de participer au prix (sélection des livres et des jeunes jurés) pour cause d'écriture d'un nouveau roman cette année...
étrange et fabuleux ce don qu'elle a d'habiter un texte par sa lecture, n'est-ce-pas ?