Du temps où l'on bloguait, ép. 7
Où comment une simple blague
finit par changer un petit monde.
Près de 80 blogueuses (et 4 blogueurs) avaient participé aux Harlequinades, et l'heure était au vote. Et il y en eut des votes, et des sincères, où l'on ne votait pas pour la copine mais pour le texte le plus drôle, parce qu'on avait envie de rire et qu'il n'y avait rien à gagner.
(Et puis finalement, d'ailleurs, si, il y eut quelque chose à gagner, d'ailleurs : les rires résonnaient si fort sur la toile que les éditions Harlequin elles-mêmes, qui n'y connaissaient que pouic au web, eurent vent de l'affaire et volèrent au secours du succès en proposant de doter le concours (en livres que personne ne lut, je crois)).
... Et ainsi donc, en octobre s'achevèrent les Harlequinades.
Mais leur écho porta bien plus loin que les seuls rires et gloussements étouffés d'une pochade estivale.
Car le concours avait réveillé chez les blogueuses l'instinct de plaisir et de liberté des premières années, l'envie toute simple et si rare de faire ce qu'on veut. Et au fond, que voulaient-elles ? Du romanesque, du vrai. Elles avaient envie de parler de Hunger Games ou de Jane Austen, ou de livres jeunesse, ou de vampire, elles voulaient des intrigues, des personnages et du sexe si affinités mais sûrement pas des Sacha Sperling ou des bêtes à Goncourt dont les éditeurs gavaient leurs boîtes aux lettres.
Ainsi l'automne 2009 fut-il comme un printemps sur la toile. Une à une, les amazones de la critique envoyèrent balader les attachées de presse des éditeurs traditionnels comme elles l'avaient fait avec wikio, elles achetèrent sans le moindre complexe des livres aux couvertures colorées et au contenu épicé, elles les chroniquèrent, se les échangèrent... Un grand mouvement était lancé que personne à StGermain n'avait vraiment vu venir. Une critique populaire émergeait (tu as remarqué comme tout ce qui est étiqueté populaire est d'habitude abandonné à la seule publicité?), l'art du feuilleton était dépoussiéré...
Autant dire que tout était mûr pour le succès de 50 nuances de Grey.
Et tandis que la presse grand public accompagnait ce mouvement étrange qui veut que tous les dix ans une œuvre érotique accède au Graal du grandpublic, tandis que la presse littéraire s'interrogeait sur lesraisonsdusuccès et déversait sur le livre toute sa condescendance, les blogueuses, elles, n'étaient nullement étonnées. Et elles ne se privèrent pas, elles qui l'avaient lu, d'exercer leurs sarcasmes...
Ce qu'on ne savait pas encore, c'est que l'une des organisatrices de ces Harlequinades, alors reine blogueuse et enseignante adulée, serait approchée par l'un des concurrents de Harlequin pour traduire à son tour (et avec bien plus de verve que les traducteurs de 50 Shades) une série SM... Sur les cendres brûlantes de Happy Few, Angéla Morelli était née.
A suivre...
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PS – je n'ai pas mis de lien vers les vainqueurs des Harlequinades, parce que figure-toi que plus un seul de ces blogs n'est actif aujourd'hui. Sic transit gloria webi. En revanche, Karine de Moncoinlecture, à qui j'avais donné ma voix, est encore là, et joliment.
Quant à moi, eh bien, je m'étais bien amusé. J'avais écrit cette quatrième de couverture, là... Et figure-toi que cinq ans plus tard elle me titille encore parfois, l'idée d'écrire ce livre. Si tu as envie de le lire ou si tu as des infos sur George et Alfred (ou Fred), viens, je t'offre un verre.
Commentaires
En parallèle, côté mecs, il y eut aussi le challenge "Chick Lit For Men", également mémorable. Le blogueur instigateur de ce défi a aussi fermé boutique, hélas...
Dame ! Je n'ai jamais vu passer ce truc là... Il y avait du monde ? ,)
Une vingtaine de mecs s'y sont mis - l'idée étant de faire lire de la chick lit aux hommes de la blogo. Les blogueuses jouaient quant à elles le rôle de spectatrices actives.
J'ai retrouvé le billet d'annonce du défi:
http://romansetlectures.canalblog.com/archives/2008/12/04/11623194.html
... et celui du bilan:
http://romansetlectures.canalblog.com/archives/2010/01/07/16397327.html
Vu ! Intéressant de voir qu'un participant sur deux a lâché en route... Mais que tu as presque comblé le manque à toi tout seul ^
(et le côté "supportrices" était une excellente idée)