Quand je serai vieux, je répondrai à tous les sondages, juste pour le plaisir de les fausser.
Pour éviter d’être réveillé par Pascal ou Aurélie tout en conservant une ligne fixe, je ne connais qu’une solution : ne laisser mes coordonnées sur aucun site, rester planqué et passer entre les gouttes - un citoyen furtif à l’abri des sonneries du marketing intrusif…
Mais il reste des trous dans ma ligne Maginot téléphonique.
Alors, à chaque fois que je reconnais l’accent de Pascal ou d’Aurélie, je me prends à rêver un court instant qu’on m’appelle enfin pour un sondage politique.
Quand je vois le nombre de sondages produits, je me dis que statistiquement on aurait déjà dû m’appeler.
Quand je vois la place qu’ils prennent (plus ils se trompent, plus on les écoute – l'effet Alain Minc), je m’énerve et j’éteins la radio, je me dis que le jour où on m’appellera, ma voix comptera comme jamais.
Car je sais ce que je ferais : je dirais que je vote Le Pen.
Imaginez un peu : avec tous les bidouillages retraitements opérés par les sondeurs (parce que dans les chiffres bruts, si je ne m’abuse, le FN ne dépasse jamais 5%), en un seul bobard je le ferais monter d’un demi-point !
Mais jamais Ipsos ou BVA ne m’appellent.
Ou plutôt si, une fois.
C’était en 2002. Début avril je crois, quand Jospin déjà déraillait dans la semoule. L’idée de Le Pen au 2e tour était loin encore, mais déjà on sentait que les sondages le sous-estimaient. C'est là que l'idée avait germé. Ça n’aurait pas rendu la campagne de Jospin intéressante, bien sûr, mais au moins ça aurait pu faire peur à quelques-uns… Et là, dring.
C’est pour un sondage politique, a dit Aurélie d’une voix sèche.
Mon cœur à gauche s’est mis à battre fort, j’avais déjà mon idée en tête, je m'éclaircissait la voix, enfin j’allais pouvoir peser en direct sur le destin de la France !
Mais d’abord si vous le voulez bien j’aimerais vous poser quelques questions sur votre situation.
Trop concentré sur mon engagement historique ("je vote Le Pen"), je me suis contenté de lui dire la vérité : mon âge, mon sexe, ma ville, ma profession, ma tranche d'imp...…
Et avant même que je n’aie eu le temps de lui dévoiler la faiblesse de mon taux d’imposition, elle m’a coupé :
Nous avons suffisamment de profils comme le vôtre, merci.
Et elle a raccroché.
Aurélie m’a raccroché au nez !
Elle n’a jamais rappelé. On sait ce qui s’est passé ensuite.
Commentaires
les aurélies sont toutes vénales, c'est bien connu...
Mon pauvre! Rq avec ts les renseignements donnés, si tu avais dit que tu votais Lepen, qui dit qu'ils auraient pris en compte ta réponse. Ils se seraient peut-être dit, tiens un petit rigolo qui cherche à fausser nos stats. Et pouf à la trappe. Courage!
J'ai eu droit à des sondages politiques. Le pire? On m'a demandé mes préférences politiques, puis quelle voiture j'aimais, puis quels yaourts j'achetais, puis à quelle sauce j'allais être mangée... J'étais effarée. Mais bien sûr, ça coûte moins cher...
(sinon, pas merci, secondflore, parce qu'Aurélie du Maroc m'a appelée hier... Elle n'a pas compris pourquoi j'ai dit "tiens, c'est drôle!")
Moi, même pour rire, Le Pen peut aller voir chez les Grecs si j'y suis...
N'empêche, moi aussi Aurélie m'a appelé hier... heu non, elle m'a envoyé un sms me demandant de la rappeler au numéro gratuit qu'elle m'indiquait! Bon sang, on est repérée !!!!
En plus, elle m'a fait, à peu de choses près, le même coup qu'à toi. Bonjour de circonstance, elle commence:
-Vous avez bien contacté notre Service Client le ... avril ?
- Oui
- Avez-vous été satisfaite du service?
- Oui
- Vous a-t-on dirigé vers un technicien?
- Euh... non... enfin je sais plus... je crois pas...
- Ah... Vous a-t-on dirigé vers un technicien ou pas?
- Je vous dis que je m'en souviens plus... mais je suis presque sûre que non...
- Bien, merci d'avoir répondu à mes questions...
- Quoi? Déjà fini?
- Oui, on ne s'intéresse qu'aux clients ayant parlé à un technicien
- Ah...
- Au revoir... blablabla....3
Pffff... 5 min de perdu pour rien !!!!
(Oups... j'ai fait long cette fois-ci...)
Quelle est votre situation professionnelle ?
- Chômeur...
- Nous avons trop de profils comme le votre -
"L'effet Alain Minc"... Grande forme second flore! Je partage ta détresse, on ne m'a jamais sondé rien d'autre que les amydagles.....
> Mikael : un déterminisme étymologique ?
> Cassiopée : penses-tu ! ils auraient plutôt alerté les médias sur la montée historique du vote Le Pen chez les classes moyennes en milieu urbain...
> Presque : il paraît que les habitués des yaourts La Laitière au goût Tarte-aux-fraises votent Sarkozy à 42,5%...
(qu'est-ce qu'elle voulait, Aurélie ?)
> Nevea : je préfère dire que je vote Le Pen et avoir Jospin en président plutôt que d'avouer un vote biip et me retrouver avec Chirac... Au fond, c'était un beau sacrifice à peu de frais.
(et sinon - c'est une technique classique de manipulation : créer une frustration sur un sujet mineur pour obtenir un engagement sur un sujet majeur)
> Brg : j'ai pensé très exactement à ça !! j'aurais dû dire que j'étais artisan. quel con...
> Castor : à croire qu'en réalité ils n'interrogent personne... ;-)
plus il y a de pourcentages, moins il y a de sondés, quelle économie
Aurélie (c'est la première fois que j'entendais mon nom de femme presque mariée si bien prononcé) voulait me parler d'un fournisseur d'accès à Internet, je ne sais même plus lequel (je ne le connaissais pas, surtout).
J'ai tenté : "j'en ai déjà un" elle m'a dit, sournoise: "oui, mais le mien il est mieux" donc je lui ai répondu "même pas vrai", elle a dit "si", j'ai dit "non", elle a dit "si, si, oualalaradim", j'ai dit "non, ralas", etc. J'ai poliment conclu par un "désolée, bon courage, bonne journée" parce qu'elle ne savait plus quoi dire. Je l'entendais chercher dans ses feuilles, mais apparemment, ils n'avaient pas prévu ce type de dialogue. Etonnant, non?
Je me souviens des questions sur les équipements des ménages il fallait en plus placer, les chéfaillons parfois étaient complices, ou tenter de placer l’inventaire de la chanson de Vian : un frigidaire, un joli scooter, un atomixer, un dunlopillo, une cuisinière avec un four en verre, des tas de couverts, des pelles à gâteaux, une tourniquette, un bel aérateur, des draps qui chauffent, un pistolet à gaufres etc. C’était difficile. Je n’ai jamais réussi…
Ah ben oui, forcemment, Aurelia, du latin "aureus"...
> Griz : le corps électoral est très sensible aux pourcentages...
(tiens, une idée - supprimer la campagne (on n'en est pas loin) et matraquer pendant un mois des sondages délibérément truqués... qui sait, le résultat du vote ressemblerait peut-être au sondage.)
> Presque : Aurélie "cherchait dans ses feuilles" ???
c'est une image ? ou des feuilles excel?
> Frozen : ... et du coup, forcément, la reconversion...
("les chéfaillons étaient parfois complices" - ça me fait plaisir de lire ce bout de phrase. comme une lueur d'espoir)
> Mikael : et pascal, alors ? ou alors, c'était avant l'euro...
Ah, j'ai eu un peu la même idée l'autre jour, en plus mégalo.
Le truc c'est de lancer un mouvement national de grêve des sondés, en demandant à tout le monde de répondre Jean Marie ou Arlette (la prime à la persévérance).
Même si tout le monde ne suit pas, ça fausserait suffisament les sondages.
Dernièrement j'en ai vu un réalisé auprès de... 84 personnes!
> Tofu : mais ça devrait bien pouvoir se relayer, un mot d'ordre comme ça (pour une prochaine élection, peut-être?).
D'ailleurs rien qu'en jetant la suspicion ça aurait de l'effet...
En avant camarades ! ;)
Si j'ai bien compris, c'est par la faute directe de ton manque de clairvoyance que Chirac a été réélu.
Ben mon garçon, t'as pas honte ?
> CUI : disons que, aveuglé par la grandeur de mon destin, j'ai soudain négligé les petits détails qui parfois font basculer l'Histoire. Me le reprochera-t-on à jamais ? ;-))
> Presque: Excellent, le coup du dialogue "Oui / Non / Si / Non / etc. " !
Sinon pour le côté fausser les sondages, j'ai un ami qui il n'y a pas longtemps a été interrogé par un journal gratuit (Métro, 20 minutes, etc.) au sujet du drapeau français. Et, le plus sérieusement du monde, il a répondu: oui j'en ai chez moi, pour moi c'est une sorte d'évidence, d'ailleurs je ne rate aucune occasion pour le brandir, c'est très important pour moi. Et le lendemain, il avait sa photo + son interview dans ledit journal. Bon, son objectif à lui c'était surtout de faire rire ses potes, mais quand même, ça montre à quel point les interviews ayant pour but de "prouver" des tendances ne valent pas grand-chose! (Parce que, ça va sans dire, il n'a pas de drapeau français chez lui.. ) (Oui j'ai des amis farceurs, que voulez-vous...)
> Catherine : ... une photo de lui sans le drapeau français ?
vraiment pas pros, chez les gratos !
Le journalisme, le vrai (celui qui cherche à décrire la réalité sur un sujet donné, et non à remplir vite fait son feuillet pour "faire dui rédactionnel" entre deux pubs), est presque mort. Alors autant s'amuser !
(j'ai bcp aimé aussi le "donnez-moi votre n°, je vous rappelle :)
Catherine...: merci !
Secondflore...: justement, non, pas Excel, j'entendais du papier. Oui, du papier, Monsieur Machin, vous vous souvenez?
Du papier, donc. Souvent on ne s'en souvient que quand il n'y en a plus, mais j'y suis resté très fidèle.
En revanche, de la part d'Aurélie, je suis estomaqué. Elle avait de la chance, en un sens.
Sondage politique
http://sondage.midiblogs.com/files/Sondages_politiques.2.doc
echofrance@hotmail.fr
Mon commentaire pascal n'est pas passé. J'y disais juste que "Souvent on ne s'en souvient que quand il n'y en a plus" m'a beaucoup fait rire... Oui, je suis bon public (plus que pour les sondages)
Allez, maintenant je peux avouer que j'ai souri bêtement quand l'idée m'est venue.
Salutations bon public, et loin des sondages échangeons donc des sourires polissons.
Sourire polisson, alors...
(tiens, j'ai pensé à vous ce matin en "lisant" Métro. Il y avait un sondage: "pensez-vous que les sondages reflètent la réalité?" Je vous laisse deviner les résultats)
> Presque : je vois que vous avez de saines lectures ;-)
Une idée me vient - un sondage après chaque page : "auriez-vous lu cette page si vous aviez su ce qu'il y avait dedans ?"
Dommage que l'Aurélie n'est pas pensé à te rappeler en avril dernier ...
> Anne : ah oui mais cette année tout était joué d'avance...