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La nana de la pub ipod

Elle est montée à Chateau-d'Eau, de la vapeur de sueur montait déjà dans le wagon. Petit short bleu, top rouge et ongles vernis au bout des tongs - même sa peau avait le bronzage fluo. A la poche de son short, elle avait clipé un mini-baladeur qui l'isolait du monde. Avant de comprendre qu'elle était faite de chair et d'eau, j'ai cru qu'il s'agissait d'une de ces filles un peu abstraites qui dansent la modernité triomphante dans les pubs 3.0.
Parisienne ? Touriste ? Peu importait - elle était citoyenne du monde et habitait dans son ipod.

Quand elle s'est glissée en face de moi, j'ai entendu dans ses oreilles les basses tranquilles d'une rhythm'n'soup internationale. Ça se confirmait. Elle a commencé par se contempler les ongles. A chaque vermicelle dans la soupe elle se mordillait les lèvres de plaisir, au refrain elle souriait, ouvrait légèrement la bouche pour former quelques sons muets, et tout du long elle dodelinait de la tête comme-à-la-TV. De temps en temps elle regardait un peu le monde autour, toujours souriante, presque étonnée de voir d'autres gens.
L'échange a été joli quand elle a vu qu'en face d'elle je prenais des notes - j'aurais pu être en train de faire son portrait au fusain, ça aurait été pareil. Elle m'a regardé écrire quelques instants (au crayon sur le dos d'une couverture de papier glacé - illisible) puis a fermé les yeux pour rentrer dans sa musique. Quand je levais les miens, je la trouvais regard mi-clos, le menton toujours en rythme.

La seule chose qui m'a fait comprendre que je n'avais pas en face de moi une publicité vivante, c'est quand son oreillette droite est tombée et qu'elle a dû la remettre. Sans cesser d'onduler.
Puis le métro s'est arrêté à Odeon et je suis descendu. Si j'avais su dessiner je lui aurais laissé son portrait. Malheureusement...
Elle m'a regardé descendre, elle est restée sous terre et continuait à planer au-dessus de la ville.

 

Commentaires

  • Tu sais pas dessiner, mais tu lui as laissé un poème avec ton n° de téléphone portatif ?

  • Tu aurais pu lui beam-er ta carte.
    Entre nous, je suis plutôt carte postale.

  • Tu nous as laissé son portrait, c'est le plus important :-)

  • ça m'est arrivé d'être comme un elle... à l'époque où je travaillais la nuit, un dimanche matin d'été, à 8h sur les quais du métro 8 à concorde... L'ipod n'était pas clipé mais juste glissé dans la poche... pas besoin de faire comme si j'étais seule au monde, il n'y avait effectivement personne autour de moi, jusqu'à ce que le métro quasi vide arrive à quai.
    Franchement, ce sentiment de solitude musicale dans le métro est exquis !

  • "non, non, non, je descends à Odéon".

  • > Castor : la dernière fois que j'ai écrit un poème, les téléphones portatifs n'existaient qu'en rêve !
    (même pas sûr de lui avoir laissé un souvenir)

    > Divani : ça, c'est pour un prochain remake de cette histoire...
    (moi aussi)

    > Blue Jam : tout le plaisir est pour moi ;-)

    > Emeraude : elle avait recréé sa solitude et en même temps regardait le wagon plein... une mutante souriante
    (et tu dansais aussi ?)

    > Léo : oh ben je viens de faire une découverte, dis-donc ;)

  • La nana de la pub ipod et la nana Kate Moss... Comme toutes ces rencontres qui auraient pu être et qui ne seront pas. Comme un flash dans un aéroport derrière la vitre. le même couloir, séparé par une vitre. Mais à droite ce couloir va à Kuala Lumpur à gauche il va à Vancouver. Juste un sourire...

    Joli ton texte.

  • (évidemment ! ;-))

  • > Gondolfo : une vitre en forme d'ipod, c'est exactement ça!
    (merci)

    > Emeraude : après une nuit blanche, quelle énergie ! ;)

  • D'accord avec Blue Jam.
    Joli portrait, d'ailleurs. Rien ne vous échappe, dîtes donc ! ;-)
    (PS : beaucoup aimé le commentaire de castor junior ;-))

  • Toi, tu vois une pub vivante pour iPod et elle, elle a vu une pub vivante pour Bic, tu crois ?

    (pour les vermicelles dans la soupe : clap clap)

  • > M : merci !
    (beaucoup de choses m'échappent, en vérité ;)

    > CUI : on peut dire que j'ai beaucoup Conté pour elle

  • J'ai ses coordonnées...

  • Je prends !

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