Mon rêve même pas secret, c'est d'un jour parler à une éditrice (ou un éditeur, hein) de la Biélorussie, de la Macédoine ou du Turkménistan et qu'elle/il me dise : « Ah mais oui, va donc voir comment on vit là-bas et fais-nous un livre ! »
Bien sûr, je serais dépendant de ce que je trouverais sur place. Pendant longtemps, cette pensée m'a bloqué. Mais maintenant je sais que ce n'est rien. Ce qui compte n'est pas de trouver, c'est de chercher.
Prenez Julien Blanc-Gras. Il part au Qatar pour y trouver "l'homme de la rue" au-delà des clichés. Problème : l'homme de la rue est rarement qatari à Doha, le Qatari moyen n'existe pas vraiment, et il est fuyant... Comment dès lors faire un roman de 200 pages – et un bon roman, si possible ?
Voilà une douzaine de pages que je suis au Qatar et je n'ai toujours pas adressé la parole à un Qatari. Ah si, peut-être au douanier de l'aéroport. Quoique, à la réflexion, non, nous ne nous sommes pas parlé.
Eh bien oui, c'est possible. Il faut le talent insolent de l'auteur pour parler avec légèreté de sujets qui le sont moins, son regard pour trouver le sel dans une conversation peu épicée avec trois types au coin d'une rue, son inconscience pour s'aventurer dans un raid en 4x4 avec des inconnus, sa sympathie opiniâtre pour finalement trouver... je ne dévoilerai rien, mais on finit toujours par trouver quelque chose.
Un jour, mon rêve même pas secret se réalisera, je le sais. En attendant, les jours de septembre froid, pour me réchauffer, je lis Julien Blanc-Gras. Et vous ?