Avant d’attaquer la Rentrée™, une petite tradition.
Comme chaque année avec retard, j’ai enfin lu cet été le lauréat du Prix de la page 111 de l’an dernier.
Et ça se confirme : ce prix absurde a décidément un don pour sacrer de vrais bons livres.
"Le Bruit des tuiles", de Thomas Giraud (éd. de la Contre-allée), c’est le roman d’une utopie foireuse portée par un idéaliste orgueilleux. Pas un loser magnifique, mais un homme qui se perd, magnifiquement campé. A l’heure où on se cherche à tout prix des utopies, ça peut être salutaire.
Et puis, au-delà du message, il y a le voyage.
« Tu vois, je ne comprends pas qu’un roman aujourd’hui puisse ne pas s’intéresser au monde qui nous entoure : les plantes, les animaux, les pierres », disait la jeune femme sublime et inspirante qui m’accompagnait au Familistère de Guise dans la librairie duquel j’ai trouvé le roman.
Eh bien, ce Bruit des tuiles, ça n’est que ça : l’histoire d’une trentaine d’Européens (français, belges et suisses) au milieu du XIXe siècle, embarqués pour une colonie dans le Nouveau monde où ils inventeraient une société nouvelle, tout ça pour comprendre en arrivant qu’ils se sont fait refiler les terres les plus pourries du Texas et que personne n’a l’intention de les aider. Comment vont-ils s’arranger avec la nature hostile, avec le leader qui déprime, avec le sentiment d’échec qu’ils tentent de refouler ? 200 pages fines et incarnées à la fois.
Franchement : je n’avais pas voté pour cette page 111-là, je le regrette presque.
… et je recommande la visite du Familistère de Guise : ce coin de France est fameusement méconnu, faites seulement attention aux radars, et profitez des paysages : il y a des rivières, tout plein, des vaches et des falaises cachées. Ce n’est pas très utopique, mais c’est déjà pas mal.