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Maîtres de balais

7 juin 2009, Point Ephémère, 20 heures.
L'Europe était loin, très loin - et juste à deux pas.

Sur la scène, un écrivain (irlandais), un comédien (italien), un journaliste et un éboueur.
Le danger, dans les événements estampillés littéraires® avec lecture publique, c'est que le public s'ennuie ou s'extasie devant le style en oubliant l'objet. Parfois c'est normal - l'auteur est en plein exercice de style, on vient écouter le texte comme on regarderait du patinage artistique. Parfois c'est dommage - l'auteur montre la lune et on regarde son stylo.
Rien de tout ça, dimanche soir.

Le texte de Robert McLiam Wilson parlait des éboueurs, guerriers d'une modernité forcément propre et qui produit du déchet comme jamais. Il racontait assez simplement pour qu'on se projette en gilet jaune et en balai, il racontait la douleur physique du ramassage et le regard des passants sur les balayeurs en pause. Et c'était littéraire, bien sûr, parce que sans pirouettes il parvenait à créer des images nouvelles - et parce qu'il en faut, du talent, pour se mettre en scène tout en s'effaçant devant son objet.

Entre deux lectures, Dominique Carfantan, éboueur, racontait le métier - l'organisation du service, les glaneurs après les marchés, la privatisation du ramassage, les heures sup à nettoyer la merde du public venu voir le film d'Arthus Bertrand sur le Champ de mars.
Quand les questions sont venues, elles s'adressaient autant à lui qu'à l'auteur. Et le public était debout - pas pour une standing ovation (quoi qu'il n'eût pas fallu grand'chose), mais parce que la salle était pleine, et qu'elle l'est restée parce qu'on avait beau parler poubelles, il n'y avait rien à jeter.

C'était un beau dimanche soir, Paris en toutes lettres mais les lettres n'étaient qu'un prétexte pour parler de la vie, la vraie - et de nous, au singulier et au pluriel.
Cheers, Mr Robert.

PS1 : un extrait du texte ici (et oui, j'ai piqué le titre de Télérama - y en avait-il un meilleur ?).

PS2 : retrouvé hier avec plaisir cette note de 2007, sur Les dépossédés.
L'histoire continue, donc. Robert McLiam Wilson habite bien à Paris. Pour les prochains romans, on n'en saura pas plus. J'ai été heureux de vous offrir une bière (un demi! honte à moi) - pour les rois on y reviendra, mais dimanche soir déjà sur l'estrade vous leur avez mis quelques coups.

Commentaires

  • Enorme jalousie... Je comprends ta honte, si j'avais l'auteur d'Eureka Street devant moi, c'est pinte obligatoire... La prochaine, j'en serais c'est sûr...

  • Pareil : jalouse…

  • Calmons-nous les amis ! Si vous croisiez un auteur irlandais en train de signer des livres après une (belle) lecture sans bière à côté de lui, vous iriez lui en chercher une, that's all...

  • J'aurais bien aimé être là!

    Accent Grave

  • Oh! (ça faisait longtemps) (salutations)

  • Merci pour le lien ; ça fait plaisir d'avoir des nouvelles de McLiam Wilson...

  • En espérant en avoir d'autres prochainement...

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