Tiens ! Le ciel est gris.
En attendant le bleu je vais me mettre au vert.
Un mois sans connexion, ou presque, retour prévu le 21 mars.
D'ici là tout aura changé, non ?
Amusez-vous bien, et à bientôt.
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Tiens ! Le ciel est gris.
En attendant le bleu je vais me mettre au vert.
Un mois sans connexion, ou presque, retour prévu le 21 mars.
D'ici là tout aura changé, non ?
Amusez-vous bien, et à bientôt.
Rue Guy Môquet, 23h40. Il fait froid mais le vent est tombé, en journée le ciel a été bleu. La rue est déserte : le café a fermé, les gens sont rentrés chez eux. Aucun bruit de moteur ne vient troubler la nuit, les voitures elles aussi sont endormies, de part et d'autre de la chaussée. Un calme d'hiver serein en attendant le printemps, le temps qui se fige près de la Cité des Fleurs. Seul bouge au loin le gilet fluo de l'employé de la fourrière de nuit, qui méthodiquement enlève les voitures qui ne gênent personne, sur la droite de la rue. Dormez bien, brave gens, demain vous serez plus légers de 136 euros.
***
Lendemain matin, sous le périphérique. Les victimes du racket font la queue dans l'Algeco de la fourrière Pouchet. On se raconte nos histoires de la nuit - la résignation l'emporte sur les envies de mettre le feu à l'endroit, on se fait des politesses, quelques sourires.
Au fond de la pièce, une affiche clame que "la Préfecture reste à notre écoute pour progresser".
Une pensée très forte pour ce type à qui une patrouille de police a dit "Vous pouvez vous garer là, jusqu'à 7 heures ça va", et qui maintenant attend derrière moi.Une pensée aussi pour les flics qui vers 23h30 sont passés rue Guy Môquet (paix à son nom) pour aligner toutes les voitures. Je me demande si comme les fumeurs de shit et les clandestins les conducteurs garés du mauvais côté entrent dans les stats des délits résolus.
Evidemment, on pense toujours que les flics ont mieux à faire.
Je me dis qu'au moins, à cette heure là, ils n'étaient pas au cinéma.
(salut)
Oui, moi aussi je peux faire des titres putassiers.
Jusqu'à ce que la communication gouvernementale ne s'en mêle, je croyais savoir que la grippe tuait 5000 personnes pas an en France. Je lis ce matin que la grippe A a tué jusqu'ici 300 personnes ; or, nous dit-on, le virus A étant plus fort que l'autre, il l'a largement supplanté.
Manque donc une info, que je ne trouve nulle part : grippe A + saisonnière inclues, y aurait-il eu cette année (beaucoup) moins de morts de la grippe que l'an passé ?
Idée subsidiaire :
Je ne sais pas comment les virus se battent entre eux, si A va durablement supplanter Saisonnière ou si ce n'était qu'un virus de passage... Mais admettons que l'an prochain on revienne à la situation antérieure - en gros, ce qu'on connaît depuis 50 ans. Et voyons la chose avec nos lunettes Laurence Ferrari. 5000 morts en, mettons, 6 mois, ça nous fait du 830 morts par mois, presque 30 par jour. De quoi faire du titre, du feuilleton, du vrai journalisme qui quête le sens !
Alors nous aurons peut-être droit au décompte quotidien des morts de la grippe au jité - "la barre psychologique des 300 morts a été franchie la semaine dernière ; 307 morts, selon le Ministère, c'est une hausse de 79 % par rapport à l'an passé", etc.
Suivrait un reportage sur le déstockage des deux milliards (oui) de masques achetés par le gouvernement en 2009.
Pure fiction, bien sûr.
Un soir de semaine, Paris XIXe. Le décor : un centre social. Des tables, des chaises, un tableau blanc, des hommes noirs.
Derrière les tables, ils sont une dizaine. Ils sont en France depuis plusieurs années, ils travaillent sur les chantiers, dans les carrosseries ou dans les cuisines des restaurants, leur vocabulaire est limité mais leur bon sens est sans faille.
- Quelles maladies connaissez-vous ? demande la conseillère familiale et médicale.
Diabète et palu viennent en premier, puis un silence.
- C'est tout ?
- Ah si ! dit Abdoulaye. Il y a la grippe A qui fait ses pubs, là, mais ça marche pas.
Approbation à sa droite. La formatrice embraye.
- Et vous êtes allés vous faire vacciner ?
Non.
- J'ai reçu leur papier, continue Abdoulaye, mais ça m'intéresse pas.
- Il faut y aller, dit la formatrice, sans grand enthousiasme.
Un peu plus tard, détail piquant, on apprendra qu'elle non plus ne s'est pas fait vacciner.
(on apprendra aussi que le SIDA ne s'attrape pas par téléphone, mais c'est une autre histoire)
Il existe très peu de livres sur l'entreprise - des bons, je veux dire. Peut-être parce que les écrivains, en général, ne connaissent pas. Ou alors ils connaissent mais veulent dénoncer, cherchant la formule choc pour régler leurs comptes avec le Système. En gros, l'entreprise c'est le Mal, et les patrons de beaux salauds. Voilà qui fait autant avancer le schmilblick qu'une tirade antisarkozyste dans un dîner.
Il y a quelques exceptions, heureusement. Dans le genre noir, je me souviens du portrait de DRH de Laurent Quintreau, dans Marge brute. Mais ce n'était qu'à la marge, justement (le projet du livre était quand même une analogie avec les Cercles de l'enfer). En plus lumineux, Antoine Bello (patron et romancier) parle du Système en connaissance de cause. On peut trouver naïf ses Eclaireurs, mais c'est bon parfois de voir les verres à moitié pleins.
J'ai pensé à Antoine Bello justement ce week-end, en lisant La nuit du Vojd, d'Hervé Bel.
Le héros du livre, Ivan, vient d'intégrer le service d'élite d'une grande entreprise dominée par la figure de son patron tout-puissant : le Vojd. Sa première mission : comprendre pourquoi la production d'une usine de chars a chuté de 7%, trouver le cadre coupable et lui extorquer des aveux. Le stalinisme appliqué au contrôle de gestion - l'auteur sait manifestement de quoi il parle.
Il y a quelques belles réussites, dans ce livre. Le sens du détail pour faire vivre l'histoire (malheureusement pas les intrigues secondaires), et celui de l'ellipse qui la rend universelle. Les rapports entre Ivan et son chef sont parfaitement dépeints (ah, les émois du jeune cadre, frétillant de la queue à chaque gratification, se nouant le ventre au moindre sous-entendu négatif dans la bouche d'un supérieur...) - image vivante de la violence des échanges en milieu tempéré.
Globalement, la façon dont le jeune Ivan aux idées généreuses se fait avaler par la machine est assez crédible (dommage que l'auteur vienne régulièrement rappeler que lui-même n'est pas dupe), avec une vision intéressante de la dimension politique de l'entreprise : les cadres en cour, les disgrâces, les coups de pute et les compromissions, le faire-semblant. Et le lèche-bottes à tous les étages. Le problème, c'est que si Hervé Bel décrit très bien la lèche, il ne peut pas s'empêcher de se concentrer sur les bottes. Comme beaucoup avant lui, le livre n'échappe pas à la métaphore du régime totalitaire. Comme si le livre commençait par un gros point godwin.
Au fond, les meilleurs livres sur l'entreprise restent peut-être ceux de Jean-Marc Roberts : Affaires étrangères pour la tension entre le salarié et son chef, ou Les Bêtes curieuses (portrait de cadres avec dames)*.
Reste cette question : qui écrira Les bêtes curieuses à l'heure de powerpoint et du blackberry ?
* adapté au cinéma sous le titre "Que les gros salaires lèvent le doigt". A l'époque, ils levaient l'index. Depuis quelques années, ce serait plutôt le majeur. Levez bien haut le doigt, Didier Lombard.
publie "un essai bouleversant sur l'impossibilité d'écrire".
Impossible de vous en parler.