Puisqu'on est dans la grande littérature, restons-y. Ce week-end, par hasard, je suis tombé sur Sacha Sperling. Qui ? M'enfin... L'auteur ado de la promo 2009 (il en faut toujours un, Saint-Germain se nourrit de chair fraîche), le 500e "nouveau Bonjour tristesse" (Frédéric B. dixit) depuis 1954, le nouvel espoir de la littérature !
J'en vois certains qui disent qu'on s'en fout. A eux je dis que oui évidemment - je les salue et les renvoie vers le meilleur article (vraiment) publié sur le sujet par un-type-qui-l'a-pas-lu :
La littérature avec circonstances atténuantes, c'est ici.
Mais il est aussi des esprits chagrins scientifiques qui ne se satisfont pas des a priori. Qui disent que pour critiquer il faut avoir lu. Et c'est vrai, du temps où son auteur passait en boucle blonde à la télé j'avais assez envie de dire du mal de ce livre. Alors, pour ne plus me réfréner, quand je suis tombé dessus je l'ai pris, je l'ai ouvert. Allez, c'est parti.
D'abord soyons honnêtes : Mes illusions donnent sur la cour, c'est un bon titre.
Ensuite analysons nos préjugés : je flairais la pâle imitation du pire B.E. Ellis (voir le milieu de Bubble Gum, de Lolita Pille), 5 marques par page, du nombril partout, de la drogue et des phrases choc à la fin de paragraphe creux.
Eh ben, soyons honnête jusqu'au bout : j'avais tort. Oui Monsieur, je le confesse. Et je m'explique.
1. Le livre n'est pas si mal écrit, je me suis dit en plongeant dans mon bain. Vraiment. Evidemment, on peut trouver des skyblogs écrits aussi bien, mais on pourrait dire ça aussi de 95% de la production adulte. Et surtout, il évite le pire - l'imitation. Je dirai même qu'on sent quelque chose dans les premières pages (mais bien mons que dans le prologue de Hell).
2. Restait le plus difficile quand on passe du skyblog au roman : construire le récit, raconter une histoire et tenir la longueur.
Bon. Pour la construction, c'est assez simple : vous prenez tout droit, vers le bas, ne changez surtout pas de rythme et hop, vous arriverez au bout. Pour l'histoire, c'est celle d'un ado Coca light qui se laisse entraîner dans la spirale du mal-être par un jeune kronenbourg qui l'initie à plein de choses, dont la coke pas light.
J'en vois là qui ricanent - encore un bouquin inutile où on n'apprend rien, diront-ils.
Et là, je dis non. Le temps d'un (long) bain, j'ai appris plein de choses : que les ados ne sont pas tous bien dans leur peau, qu'ils sont impressionnés par les mecs cools un peu plus âgés, que les parents trop (riches et) cools c'est pas forcément l'idéal, qu'on s'emmerde quand même un peu quand on a 14 ans, que les filles mettent un peu trop de parfum pour leur tout premier rendez-vous, que les jeunes (riches) d'aujourd'hui font des trucs que nous on n'aurait pas faits, que les joints et la cocaïne sont pas si inoffensifs que ça, qu'on s'emmerde vraiment quand on a 15 ans et que la vie, franchement, ça n'a pas beaucoup d'intérêt.
Du coup, ben faut pas s'étonner que quand les ados écrivent des livres sur leur vie, ça n'a pas beaucoup d'intérêt.
Mais on ne peut pas leur en vouloir. On peut juste se demander si les adultes qui les promeuvent (entre ici Ali Badou, regarde-moi dans les yeux comme tu l'as fait en septembre et dis-moi que c'est le nouveau souffle de la littérature) ne sont pas aussi irresponsables que les parents des gosses de riches du XVIe.
Là on me dira que non, ils savent très bien ce qu'ils font. Et on aura raison.
Voilà.
(PS - qu'on considère que ce billet me donne le droit de parler du prochain écrivain-ado-newgeneration-j'ai16ansetjevaisaubaron sans l'avoir lu. merci.)