Référendum européen, embrasement des banlieues, mouvement anti-CPE : une année, trois séquences politiques et autant de refus (...)
C’est l’histoire de trois romanciers (François Bégaudeau, Arno Bertina et Oliver Rohe) qui parlent politique et qui ne sont pas d’accord. Alors ils décident d’écrire un livre ensemble, pour comprendre.
J’ai acheté le livre (7€50, franchement, c’est donné) pour soutenir la démarche, surtout, un peu dubitatif tant le projet était casse-gueule. Et pourtant : le livre n’est ni un roman, ni un pamphlet, pas même un essai. Mais c’est un coup de maître.
La force de ce livre, c’est justement sa liberté de forme : les auteurs ne sont pas journalistes mais ils vont à la source, ils ne sont pas trucologues mais écoutent les spécialistes, ils sont romanciers mais se gardent de la tentation du romantisme creux. Ils s’amusent à parler d’une seule voix parce qu’ils ne nous parlent pas d’eux, mais de ce qu’ils voient.
Et au final, ils proposent sur les faits une vision sensible, avec de la clairvoyance et du bon sens, et des doutes qui font avancer le débat plus que bien des certitudes.
"Une année en France", en somme, c’est un carnet de notes - des notes qui donnent la parole à Karim au comptoir et qui renvoient à leurs petits miroirs le "philosophe tragique" Finkielkraut et l’anthropologue médiatique du coin. Et on lit avec joie, comme on suivrait avec passion une conversation débridée avec des types intelligents croisés au hasard d’une belle soirée.
Etonnamment, les auteurs concluent en parlant de fête. L'énergie est jeu avant d'être projet, écrivent-ils. Ça m’a semblé bizarre, au départ, et puis…
On dira "quel projet?". Or, exiger un projet c'est mettre la charrue avant la beuh car il faut un groupe d'abord, fédéré par quelque chose qui s'apparente à de la joie, par une énergie qui porte et déplace au lieu de refermer comme un claquement de volet. Le désœuvrement ruine toute énergie, individuelle et collective. Il faut un contexte violent pour récréer du groupe (...)
J’aime bien quand un livre parvient à me faire changer d’avis.
A lire sur Zone littéraire (merci), un entretien avec les trois auteurs.
PS - Il y a des livres dont on se dit : "j’aurais aimé l’avoir écrit."
"Une année en France", c’est un livre que j’aimerai écrire, bientôt.
Mais ce n’est qu’un projet. D'abord, rassemblons l'essentiel :
le groupe, le jeu et l’énergie.
A suivre !