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  • Little Buda et la petite Pest

    szechenyi_bath_budapest.jpgAvant la carte postale, il y avait le cliché : celui des bains de Szechenyi. Le ciel est bleu, l’hiver est froid, et dehors, nus, deux papis hongrois jouent aux échecs dans une eau thermale à 38°. Une image tellement vue qu’on se demande si la vérité ne s’apprête pas à vous décevoir. Mais soyons patients…

    Ce qu’on ne voit pas sur le cliché, c’est l’énergie du sourire de la jeune Csilla qui m’avait accueilli à l’auberge. On ne voit pas non plus, sur la carte postale, ce balcon sur lequel avec elle je serais bien resté plus longtemps, et cette seconde d’hésitation dans laquelle s’était soudain engouffré le Monde extérieur qui nous rappelait à l’intérieur. La suite de la carte est illisible (du hongrois, sans doute), un graphologue avisé comprendrait cependant que le temps était doux sur Pest. Vers la fin de la phrase on comprend qu’une soirée se dessine, que Csilla, surprise, est revenue, mais que je décline la soirée qui s’annonce. Pour une fois que Roman n°2 me rappelait à l’ordre avec conviction je n’allais pas lui claquer le moleskine au nez. (je suis un bonze) Pas grave, le petit charme se transformerait en doux rêve puis en souvenir, c’est ça aussi les vacances.

    Mais il y a un PS, au bas de la carte.
    Il est 7 heures le lendemain matin et j’entends frapper à ma porte. Chez Murakami ce sont les rêves qui se pointent ainsi, mais ici c’était bien elle sur le palier. Une forte odeur de bière brune et de nuit blanche emplit la pièce, vite balayé par ces yeux qui vous entraîneraient au bout du jour, et ce sourire rien qu’à elle, la bouche à moitié fermée pour cacher une dent un peu gâtée. Derrière elle, Nick l’Australien et une autre hongroise, mais leur image est couverte par la voix hachée de Csilla, exaltée comme une gamine.
    - Bertrand, we’re going to the baths !
    - ?
    - We haven’t slept, I just came back to wake you up
    Elle commence à argumenter, je sens qu’elle pourrait ne pas s’arrêter.
    - ... I know you wanted to go and I thought…

    Réflexe. Mes mains sur ses épaules pour la faire taire en douceur.
    - Shh. I’m coming.

    C’est beau, les vacances.
    Et elle était belle, cette matiné aux Bains. Une heure plus tard, nous avions intégré le vieux cliché, tous ensemble à regarder une partie d’échecs au milieu des vapeurs d’eau dans le froid matinal. Quelques saunas plus tard il est déjà midi, et me voilà dehors à faire bronzette en csillante compagnie.
    A Paris, ce jour là, il faisait 6°.

    Voilà pourquoi j'aime bien n'envoyer les cartes postales qu’au retour. Je n’aurais pas voulu aiguiser votre jalousie. Maintenant j’écris ça en me caillant comme vous. Tous dans le même bain.
    Salut à toi Csilla, adorable petite peste.

     

  • Carte postale de Budapest

    Budapest.jpgA Vienne j’étais un Autrichien. A peine 250 km plus loin, je pourrais aussi bien être un Hongrois, hein, mais non. D’abord, on se sent moins chez soi quand la ville entière parle une langue impénétrable. Ensuite, le Danube s'est élargi, mon sourire aussi. Et dans la rue on ne m’interpelle plus pour demander son chemin, quand j'arrive quelque part on me salue en disant Hello! même quand je ne porte pas mon uniforme de touriste. 250 kilomètres.
    Merde, je dois vraiment être un Autrichien alors.

    En vignette de la carte postale : une petite rue tranquille, baignée par le soleil. Des salons de thé, des coiffeurs, des petites cours intérieures. Et puis soudain, une enseigne qui claque : Police Shop. A l’intérieur, des voitures de police miniature, des insignes, un mégaphone, des couteaux, des bombes lacrymo… Comme un indice de la ville qui échappe au touriste.
    Et puis, non loin, une librairie. (à suivre...)

     

  • Dans mes bras, Vladimir !

    "Teachers of Literature are apt to think up such problems as “What is the author’s purpose?” or still worse "What is the guy trying to say ?"…
    Now I happen to be the kind of author who in starting to work on a book has no other purpose than to get rid of that book."

    (V. Nabokov, post-face à l’édition américaine de Lolita, 1956)

  • A la bonne heure (Vienne, 3)

    Question du jour (vous avez 3 minutes) :
    Comment prendre son temps quand on vous donne toujours l’heure ?

    ecran-horloge.jpgEn vacances, pas de montre, pas de téléphone. C’est le soleil qui donne l’heure. (Et puis on s’en fout, de l’heure qu’il est). Ou alors, parfois, c’est l’heure qui vient à vous. Je me souviens, à Francfort, ville de finance, il y avait des horloges partout, parce que time is money. Et des horloges à cristaux liquides, s’il vous plaît, où l’affichage des chiffres donne l’illusion d’une progression continue quand la bonne vieille pendule, elle, nous rappelle bien que le temps n’est que cycles.
    Mais rien de tout ça à Vienne. La finance n’a pas encore gagné. Cette ville ne vous donne jamais l’heure.

    En rentrant, je me suis demandé si Paris était une de ces villes qui vous laisse le temps. Je n’arrive pas à trancher. Mais ça ne change rien, parce qu’à Paris, allez savoir pourquoi, je sais toujours l’heure exacte. C’est bien pour ça qu’il faut s’échapper, de temps en temps.

  • Carte postale de Vienne (2)

    A Vienne, la Pute se consomme nature, lis-je.
    - Qu’appelez-vous Pute, au juste ? je demande à la jolie blonde qui s’amène vers moi avec une grande brune.
    - Ben… C’est une dinde, me dit-elle.

    Dix minutes plus tard, ma dinde arrive, énorme, savamment panée (curieuse conception de la nature), avec une triple portion de frites.
    Heureusement que la brune était bonne.

  • Carte postale de Vienne (1)

    A Paris il fait 5°, disait le journal, ici il en fait une petite vingtaine quand je sors du musée Léopold. Schiele, le Jugendstyl, Klimt et la Sécession, quelques bastons artistiques bien mises en scène – j’ai traversé le musée comme si tout ça s’était passé à Paris, au fond je me sens chez moi en Europe.
    Et une nouvelle fois je me dis qu’un jour il faudra que j’entreprenne un voyage projet à la Geert Mak – quand tu seras grand, petit (ou quand tu voudras le devenir).
    Dans le Burggarten, je me sens tout aussi chez moi. Vienne laisse peu de place au bordel mais c’est ici que sont nés certains des courants artistiques les plus créatifs. Ce serait pas mal que ce soit pareil dans ma tête, tiens.

    Quelques mètres plus tard je me retrouve place Albertine, le nez au vent, à deux pas de l’Office de tourisme. Un sexagénaire m’interpelle en allemand pour me demander leur chemin. Bizarre. Deux minutes plus tard, une jeune femme vient me demander où est la bibliothèque. En Allemand, elle aussi, comme si elle venait de Salzbourg et pensait qu’un vrai Viennois pourrait la sauver.
    Damned, je suis un Autrichien.

     

  • Les Autrichiens sont disciplinés

    , nous dit-on. Voire. Devant moi, à Roissy, un Viennois a tenté de passer en douce un tube entier de dentifrice sans l'avoir dûment enveloppé dans un sachet plastique refermable.
    Heureusement, un fin limier d'ADP s'est rendu compte in extremis du danger.
    Ouf.
    On vit dangereusement, quand même.

    Bon, allez, tout ça pour vous dire salut que j'ai rapporté pas mal de cartes postales - je les ai achetées par paquets de dix. Je les enverrai au compte-goutte, qu'on ait un peu l'impression de prolonger le voyage. Peut-être jusqu'à Noël, tiens. Et d'ici là...