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  • Paris, Budapest, Berlin

    J’ai écrit Hors jeu dans plein d’endroits, mais il est deux villes qui ont joué un rôle important – deux villes où je suis parti alors que le roman était bloqué, et qui ont su relancer l’écriture.
    La première fois, j’étais parti sur un coup de tête en Belgique. Quelques aventures à Charleroi en guise de gymnastique, et les bars de Namur, où les serveuses sont aussi jolies que les bières d’abbaye, avaient accouché de cette idée de zone non frimeurs à partir de laquelle le livre devient correct qui m’avait ouvert tout plein de portes nouvelles. Un an plus tard, c’est à Mexico, au milieu des étudiants, que j’avais débloqué toute la fin du livre.
    Un moment j’avais caressé l’idée de mettre leur nom, à ces deux villes, en fin de livre. "Paris, Namur, Mexico – 2003-2007", ça aurait pu en jeter. Mais bon.

    Pour Truc N°2, trois villes ont déjà joué un rôle de déblocage (ça bloque beaucoup, oui). Mais "Paris, Hardelot, Sarreguemines", bizarrement, ça donne moins envie.
    Alors on va repartir, mon cahier et moi, un peu plus loin pour prendre un peu d’élan. Vers l’Est, bien sûr, parce qu’il faut toujours du nouveau.
    Bref tout ça pour dire que, fragile ou non, je me casse. Je vous enverrai peut-être une ou deux cartes postales. Peut-être pas.
    A bientôt.

  • Montecore, donc

    9782268065076FS.gifSi on voulait écrire un roman sensible sur l’immigration française des années 60-70 et les conflits entre la première et la deuxième génération sur fond de montée du racisme, il faudrait sans doute délocaliser l’action pour éviter de prêter le flanc à une critique politiquement idiote d'être étiqueté "témoignage"®. Pour faciliter l’universalité du propos, surtout . On pourrait situer l’action en Suède, par exemple, pour accentuer le contraste avec les grands blonds locaux.

    Ça tombe bien, un tel livre vient écrit par un Suédois.
    Montecore, un tigre unique, donc.
    Un titre un peu étrange, un livre un peu unique, un joli crescendo, une réussite.

    (Pour plus de détails, on en cause ici, … et dans pas mal d’autres endroits, d’ailleurs. Tant mieux)

  • Echos

    Il y a eu une rencontre sympathique, ce jeune auteur suédois s’étonnant des dithyrambes à côté de la plaque que ses romans ont pu susciter. Un écho dans notre discussion et puis revient cette idée, un peu plus qu’en l’air, d’écrire pour le théâtre. Ensuite il y a eu cette pièce comique, au centre culturel suédois, jouée avec toute l’intensité du tragique français (à lire avec des majuscules), et puis. En fait il y a eu pas mal de choses qui trouveront leur développement ailleurs. Pour l’heure il y a ces blocages à dépasser (tenter, tenter) pour faire avancer Truc n°2 – et hier soir justement, chez le même Khemiri, ce nouvel écho parfait, un bon petit pain suédois :

    "Tu es comme d’habitude invité à injecter tes éventuels souvenirs. Garde seulement ceci en mémoire : ne te rappelle pas trop d’éléments – il y a une grande différence entre le sexe d’un homme et un livre. L’un est favorisé par une large épaisseur et une grande longueur, l’autre ne l’est pas. Sais-tu lequel est lequel ? Si ce n’est pas le cas, c’est le moment d’essayer de trouver une petite amie."
    (Jonas Hassen Khemiri – Montecore, un tigre unique - p. 170)

    Bonne journée.

     

  • Scénario

    Tout a commencé quand j’ai lu cette note, là, magnifique.
    (Non, elle ne s’adressait pas à moi. Et alors ?)

     

    683px-Brouillard,_London_Parliament,_Claude_Monet.jpgSi la vie n’était pas la vie, tu m’aurais déjà épousé, oui. Tu aurais pris mon frein à main et lentement tu l’aurais desserré. Je partagerais ma vie entre Paris et le reste du monde, tu partagerais la tienne entre moi et quelques autres auxquels parfois tu résisterais, en songeant aux aventures que je repousse en pensant à toi. En prenant le chemin du retour je ne dirais plus « je rentre à Paris » mais « je reviens vers elle ». Nous habiterions un immeuble au cœur de la ville, sur le même palier mais pas sur le même appartement. Tu ne me dirais rien de tes amants, et tout de tes amantes. Grâce à toi les mots me viendraient plus facilement, tu serais ma muse et écrire nous amuserait – et vivre, encore plus. Je ferais mine de résister quelque temps mais nous les aurions, ces deux enfants, et pendant quelques années nous verrions le monde à travers leurs yeux frais. Puis l’aventure reprendrait de plus belle, parce que nous aurions pour un temps décidé d’être immortels. Un jour nous finirions par casser le mur entre nos deux appartements. Assagis nous y lirions beaucoup, mais les moments les plus délicieux seraient quand tu me lirais ces livres que tu écris en secret pendant que je. Plus tard encore nous découvririons les joies de la nature, nous jouerions encore à nous séparer quelque temps pour mieux nous retrouver, la flamme brûlerait encore, et nous parlerions du monde comme deux gamins tandis qu’avec nos lunettes à double foyer nous regarderions dans la même direction.

  • L'âme slave

    Concorde, sous-sol, 16h30.
    A l’entrée du long couloir, une femme mince se tient droite, les deux mains sur la valise qu’elle a posée devant elle. Elle pourrait hésiter sur la direction à prendre mais non. Elle pleure. Pas de chaudes larmes, non – des larmes presque sèches.
    Alors du fond du couloir montent les notes d’un orchestre folklorique slave. Je m’arrête, moi aussi, puis je prends le couloir où résonnent l’accordéon, la contrebasse et les voix graves. Et c’est vrai qu’il sont bons que c’est beau. Maintenant je sais pourquoi la femme pleure.
    Et c’est encore plus beau de les entendre en sachant que derrière, à quelques mètres, cette femme est encore là, immobile au pied des marches – comme ces scènes peintes qui nous sont révélées par un personnage dans un coin du tableau.
    Puis l’orchestre passera à des danses plus rapides, et au loin je verrai la frêle silhouette se détourner. La magie s’éclipsera doucement.

    De retour chez moi j’écris cette note en écoutant l’orchestre sur un CD auquel ne manquent que les murs d’un couloir du métro. J’ai monté le son pour mieux revoir le visage de la femme. Je ne pleure pas parce que je suis un homme parce que mon âme est sèche occidentale, mais je trinquerais bien à la vodka.
    C’est étonnant, la nostalgie de rien. Mais c’est beau.

     

  • Invitation (permanente) au voyage

    allen.jpgEt voilà. On cherche les idées, on tourne autour, on tourne tout court, on agence, on scénarise, on coupe, on rafistole, on finalise et un jour, hop ! la perfection, ou presque.
    Il en aura raté, des films, Allen. Mais là. Des personnages complexes, une histoire simple mais jamais linéaire et tout s’agence parfaitement, comme si tout avait jailli d’un seul trait.

    Vicky Cristina Barcelona n’est pas seulement un petit bijou, c’est aussi une invitation au voyage, une ode à la liberté, avec un petit cadre propret comme parfait contrepoint.
    (son arrivée toute joyeuse à l’aéroport, et les rires de la salle – tout le secret du film résumé en une scène)
    Il faudrait voir ce film avec quelqu’un qui pourrait, juste après la projection, prendre avec vous un billet d’avion pour n’importe où, juste pour le goût de l’aventure et le plaisir de faire la nique au matérialisme.
    Mais ça, je ne le savais pas.
    Alors quand celle à côté de moi a dit Il faudra que j’achète la BO du film, j’ai su que sitôt les lumières rallumées il faudrait que je la plante là. Une urgence. Et Woody et moi on s’est promenés dans la ville, en faisant des projets un peu fous avec un sourire en coin.

     

  • Modèle Standard (bis)

    m_cada0e4a82fa4463ae01632ce52b40f6.jpgJ’aurais bien aimé vous parler de Mari et femme, de Régis de Sa Moreira. Ou de la réédition de l’excellent Eloge de la pièce manquante d’Antoine Bello. Mais finalement non, parce que j’ai vendu prêté ma plume ailleurs, et que je m’en voudrais de faire doublon.

    Je vous explique en mode métaphore.
    Imaginez, donc. Vous êtes dans la rue, tranquille, tête en l’air. D’un balcon, au troisième étage, vous parviennent les rires d’une soirée ; sur le balcon les gens ont l’air sympathique. Classique. Au fond, vous aimeriez bien aller voir là haut. Et parfois, quelqu’un arrive à ce moment là, compose le code, vous sourit et vous fait entrer. Hop.

    C’est ce qui s’est passé avec Standard. J’ai découvert le magazine il y a 6 mois, puis le grand Franswa Perrin est passé par là, et avant que n’aie eu le temps de saluer tout le monde dans le salon j’étais déjà dans la cuisine – là où se tiennent les vraies discussions, où on enchaîne les demis sans faire les choses à moitié.
    Alors, quand on m’a demandé de participer, j’ai dit oui.

    Le dossier du dernier numéro est consacré à la télévision - il faut bien commencer à préparer l’enterrement de la petite lucarne. On y annonce la mort du JT (avant même les audiences de la rentrée), on y enquête sur la BBC, on y écoute Alain de Greef, on essaie d’avoir un peu d’imagination et on ouvre même le cerveau (disponible, forcément) des téléspectateurs pour voir ce qu’il y a dedans.
    Ailleurs dans le magazine, on croise Tristan Garcia et Tristan Jordis, on voyage en Irlande et au Québec, on découvre des choses bizarres. Il y a même une interview de Philippe Val que j’ai réussi à lire jusqu’au bout.

    Bref, Standard N°21 est en kiosque, et c’est une belle nouvelle.

  • Cher M. Samsung

    pv2.jpg

    Avant, j’étais un peu vert orange et j’avais un téléphone pourri. Depuis peu je suis un homme neuf, avec tout un tas de privilèges, comme celui d’accéder à la technologie de demain d’hier-à-peine pour un euro seulement.
    Ainsi donc me voilà ce matin avec dans la main votre rutilant appareil, bardé de millions de fonctionnalités que jamais je n’utiliserai.
    Bien sûr je me suis précipité sur mon nouveau jouet quand il est arrivé, pour tester ma nouvelle connexion au monde. Par exemple, maintenant je ne pourrai plus appeler des amis à l’autre bout du monde juste parce que dans ma poche la clé de l’appart a appuyé sur trois touches au hasard.
    Pour fêter ça, j’ai voulu envoyer un SMS (oui, je suis fou). Si j’en juge par ses premiers réflexes ("bonne" quand on veut écrire "conne", "corse" pour "bosse", "bonus" pour "amour"), votre logiciel d’édition de textos est le même que dans mon ancien téléphone pourri. Et ça me va très bien.
    Sauf que. Devil's in the detail : l’accent circonflexe a disparu. Juste ça. La meme chose sans le circonflexe. Comme si chez vous quelqu’un avait décidé que non, vraiment, le circonflexe c’était vraiment trop out. Grrr.

    J’ai quand meme fini mon texto – et là, le coup de grace* : j’envisageais de le conclure par un gentil petit smiley – c’est souvent un peu con, les smileys, il ne faudrait pas en abuser mais bon, parfois, hein. Et là, stupeur : ils ont disparu. Je dois etre encore plus en retard sur la modernité que je ne le pensais. Parce que les smileys tout bêtes, ceux qu'on peut faire soi-même, ben c'est dépassé, la modernité a eu raison d’eux – maintenant, sympathique client privilégié, si tu veux souligner une gentille ironie dans un sms, tu utiliseras un émotigrocon.
    (
    Meme pas en reve, connard.)

    Alors j’ai envoyé mon texto en le finissant par un point, puis je suis allé vérifier ce que je subodorais : il n’y a pas de smileys parce qu’il n’y a plus de point-virgule. Bien sur. Qui aujourd’hui utiliserait à la fois un samsungsfunclub ET le point-virgule, hein ? a du dire un jour un petit con de chef de produit en réunion. Ou alors, il ne savait pas que ça existe, le point-virgule. Et là, je pleure.
    Bref.

    M. Samsung, je ne vous dirai pas tout ce qui me passe par la tête et qui me ferait illico passer pour un très vieux con auprès des ados qui en ce moment même se draguent sous ma fenêtre.
    Mais sachez que je le pense très fort.

    Un homme Neuf.

    * ça fait con, hein ?