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  • Déraisonner

    Décapage a plus de pages, maintenant, mais la revue reste toujours aussi fine. La preuve : piochée (presque) au hasard cette petite phrase parfaite signée Erwan Desplanques :

    Etre raisonnable par nature, mais déraisonnable par conviction.

    C'est exactement ça. 

  • De l'autre côté

                 De : PDF ................................
    A : BG..................................
    Objet : Nos retrouvailles d’hier soir

    Salut mec,

    Tu avais bien besoin de bouger, hier soir, alors Istanbul, c’était parfait.

    4f0ea46416a52af26add4213d2983c12.jpgDe l’autre côté de la salle, il y avait cette jolie demoiselle que tu avais croisée au café du cinéma en attendant - mais c’est avec toi que tu avais rendez-vous. Tu as pensé à elle un peu, au début, parce que le film démarrait lentement. Puis tu as eu le temps de réjouir enfin de ces sept ans d’allemand auxquels tu n’avais jamais jusqu’ici trouvé d’utilité. Ensuite tu n’as plus pensé du tout. Tu n’es entré pleinement dans le film que dans sa troisième partie, mais alors tu as bien plongé.
    Jamais tu n’aurais pensé que deux heures s’étaient écoulées quand, au moment où tout allait commencer, le générique a commencé à défiler. Mais n’était-ce pas le plus beau générique de fin que nous ayons vu ? Un homme est assis sur la plage, il attend. Et nous avec. Et le bruit des vagues qui porte à l’infini.

    Evidemment tu as repensé aux vagues de Batroun, mais je t’accorde que tu ne t’y es pas arrêté longtemps. C’était une nostalgie un peu vide, celle qui appelle doucement à autre chose.
    C’est elle qui t’a bercé sur le chemin du retour, dans ce calme fascinant de Paris le lundi soir. Entre nous, hier, la lenteur des pas et les pneus des voitures au ralenti sur les pavés de Montmartre valaient bien le bruit des vagues. Tu avais raison, c'était bien un générique de début.

    Ce n’est qu’en ouvrant la porte de chez toi que tu as pris conscience que le Paris que tu venais de traverser n’était pas qu'un décor de cinéma. Alors tu t’es souvenu que la poésie est toujours à deux pas si tu sais la créer, et qu’il est grand temps que tu atentende d’autres vagues.

    De l’autre côté est un très beau film, entre Hambourg, Istanbul et Montmartre. Tu te souviendras de ça.
    Allez, gars, bouge-toi et marche.
    Salut.

  • Omnichiant

    Une courte note en guise de dédicace pour C., inestimable aiguillon et implacable lectrice, qui sans relâche depuis cinq ans pourfend mes narrateurs omnichiants.

    Donc, pour elle (et pour moi), ce mot de Flaubert :
    "L'auteur dans son oeuvre doit être comme Dieu dans l'univers, présent partout et visible nulle part."

    Précieux pense-bete.
    Je ne suis pas encore Dieu (ouf). Mais quelque part entre Flaubert et Toy Story, je vais bien finir par le terminer commencer réussir, ce roman.

  • Libé, Réno, camarades

    (Ne faites pas attention, ceci n’est qu’un billet défouloir. Sans relecture. Ephémère sans doute.)

    Or donc, Robert L’àfond publiera fin février un texte de Laurent Joffrin faisant suite à son altercation avec le président de la République lors de sa conférence de presse le 8 janvier (sic), apprends-je sur le site de Livres hebdo.
    Ben tiens.

    Petit rappel des faits – parce que je l’ai regardée, finalement, cette conférence de presse. Franchement, malgré sa rhétorique insupportable, j’avais trouvé Sarko impressionnant. Pas loin d’être passionnant, même – à condition de faire abstraction 1.de la certitude qu’il pourrait dire le contraire le lendemain avec le même aplomb / 2.de la médiocrité de son gouvernement qui légifère avec le nez dans les pages Faits divers, ce qui fait quand même beaucoup. Quoi qu’il en soit, je me disait que rien qu’avec les sujets de fond évoqués ce jour-là, la grande Presse Française™ avait de quoi remplir ses colonnes pendant toute l’année sans avoir besoin de nous parler de Carla B. ou de l’agenda jogging du président.
    Sauf que quand on lui a donné la parole, à la presse officielle, on s’est vite rendu compte de sa médiocrité. Avec une palme spéciale pour Joffrin, faisant le beau avec une jolie formule prétendument insolente, toute formatée pour être reprise par les confrères (une connerie sur la monarchie élective, vous en avez sans doute entendu parler, allez hop on zappe) et offrant sur un plateau un petit solo à Sarko, avec faux énervement à la clé – bref, la comédie habituelle : le décor pour faire oublier le fond des choses, du pain bénit pour branleurs médiatiques chroniqueurs à la con, tout était parfait.

    Et donc, maintenant, ce livre déjà annoncé.
    Alors là, de deux choses l’une :
    - soit Joffrin s’est mis à écrire (ou faire écrire) 200 pages en quelques jours en flairant la bonne occase (vite, coco, faut pas dépasser la date de péremption de ton actu, là). Dans ce cas, si j’étais son actionnaire, je l’aurais mauvaise et je songerais sérieusement à le virer pour mettre à la place un type qui bosse.
    - soit (plus plausible) il se contente de compiler dans un livre des notes qu’il aurait prises sur Sarko depuis plusieurs mois – ce qui serait plus plausible. Auquel cas je comprends qu’il aurait simplement utilisé la conférence de presse pour se faire sa petite pub perso.

    Dans les deux cas, c’est minable. La petite comédie continue, avec la contestation officielle parfaitement intégrée dans le spectacle. J’avais déjà remarqué ça avec les prix littéraires, quand j’ai compris que les polémiques sur les prix faisaient partie du jeu autant que les prix eux-mêmes, tout ça au service d’un gentil conservatisme. Avec la presse à la Joffrin, c’est pareil. Sauf que dans le cas des prix littéraires, tout le monde s’en branle. Pour la politique, je n’y arrive pas.
    D’où ce billet adolescent – désolé, une fois de temps en temps il y a besoin de soupape, ce soir c’est tombé ici, ce billet n’est qu’éphémère.

    Doublement idiot, d’ailleurs, ce billet.
    Parce que je déteste faire mon chroniqueur-à-la-con et hurler avec les loups (mais ici les loups sont encore loin, vous les entendrez en février, au moins vous serez prévenus).
    Et parce que je n’aime pas entrer dans les polémiques qui au fond servent la publicité d’un livre ou d’un film. Mais là c’est différent. Je sais que vous ne serez pas assez couillons pour prêter attention au livre de Joffrin. D’ailleurs j’imagine que vous n’êtes plus là. Vous avez bien raison. Moi aussi, je vais voir ailleurs si j’y suis. A bientôt.

  • Into the wild

    bc7ddf0958085a9c0074178dc7a862da.jpgEvidemment, je pourrais écrire une note.
    J’y dirais le plaisir de s’asseoir dans un fauteuil de ciné sans rien savoir sur le film, j’évoquerais en passant le plaisir de découvrir Catherine Keener au générique et la gueule parfaite de Vince Vaughn, je parlerais peut-être des prises de vue de Sean Penn et des rencontres que j’ai pu faire dans ce film – et de celles que vous y ferez, forcément différentes. Je conclurais sans doute par un éloge de la lenteur qui permet d’aller profond en évitant les lourdeurs.
    Mais.
    Mais il faudrait que je vous raconte un peu le film. Ce serait idiot : Into the wild  est une aventure, alors autant ne rien savoir au départ. Sinon qu’il y a parfois de très beaux voyages à faire, un dimanche soir.
    Bon film.

  • Distraction

    Allez, un peu d’écriture semi-automatique pour se défouler…

    Il y a plusieurs types de voyageurs, dans le métro. D’abord il y a la majorité silencieuse qui se met gentiment là où il y a de la place, et qui se pousse au fond en cas d’affluence. On connaît aussi les petits malins qui font la course aux places assises, les autistes qui restent sur leur strapontin quoi qu’il arrive…
    Il existe aussi une espèce plus rare, mais pas moins sournoise - le voyageur-planton. Celui qui se plante devant la porte, face au quai, et ne bouge plus d’un centimètre. En général on le remarque surtout quand on veut sortir et qu’il bloque tout passage. Mais parfois, c’est l’entrée qu’il bloque.
    Tout à l’heure, par exemple, station Invalides. Je vous fais la scène au ralenti : un jeune type pressé (moi) déboule des escaliers avec un grand sac à la main, il vient d’entendre qu’un métro est à quai, les portes sont en train de se refermer, le jeune homme accélère malgré ses eux sacs, il s’apprête à entrer in extremis dans la rame dans un magnifique déhanché qui déclenche les applaudissements du wagon ébahi par tant de sveltesse et de maîtrise… Sauf que devant la porte se tenait un gros con de quinquagénaire. Le jeune type aurait pu ajouter à son exploit une jolie bousculade, mais je suis trop bien élevé, alors j’ai freiné mon élan, j’ai lancé au quinqua ce regard de reproche noir dont je gratifie parfois un coéquipier mal placé sur une action de but, et j’ai regardé le métro s’éloigner.

    Jusque là, vous me direz, je ne faisais que perdre trois minutes (mais dans le métro, allez savoir, chaque seconde compte triple). En réalité, j’étais d’autant plus énervé contre le type que je m’en voulais déjà à moi-même – je ne sais pas à quoi je pensais, en sortant de ce grand magasin soldé, mais je venais de me taper une moitié de ligne à contresens. Prenant mon mâle en patience je m’installe donc sur un grand siège anti-sdf, pose à côté de moi ce grand sac et ses 70 euros de fringues soldées. Vers 15h23 je me dis « tiens, ça fait bizarre de poser un sac de fringues à côté de moi, je n’ai tellement pas l’habitude, ce serait con de l’oublier sur le quai ». Vers 15h25 le métro arrive, je monte tranquillement dedans. Vers 15h31, je replie le Canard Enchaîné, m’apprête à prendre ma correspondance, pense soudain qu’il ne faut pas que j’oublie de prendre le sac… Mais le sac, lui, était encore à Invalides. Petit retour express, bien sûr il n’était plus là.

    Voilà, maintenant c’est sûr, les soldes c’est vraiment une bonne affaire. Au moins, je peux repenser avec satisfaction à ce pull à 60 euros que j’ai reposé au dernier moment.

    Je repense aussi à ce soir de la semaine dernière, où je suis allé retirer de l’argent au distributeur avant de m’installer au café : tout content que l’appareil me rende ma carte, j’étais parti le cœur léger, n’oubliant que les billets (et ne m’en rendant compte, évidemment, que bien plus tard). Et hop, 40 euros de plus par la fenêtre.

    Si je veux continuer à positiver, je peux me dire aussi que ces quelques épisodes viennent heureusement confirment ce qui ne se traduit pas encore très concrètement dans mes carnets de note – maintenant, c’est sûr, je me suis bien remis en mode écrivain, la tête bien en l’air.

    J’espère bien qu’un jour l’écriture finira par me rapporter des sous, parce qu’on ne se rend pas compte, mais écrire, ça peut coûter cher.

  • Tu veux ma photo ?

    Image de Montréal : A. tournant soudain la tête, se cachant dans son manteau – « quelqu’un prend des photos ». Ce n’est pas nous qu’il visait bien sûr, mais. J’ai ri, au début, mais je comprenais bien.
    La première fois qu’on m’a pris en photo sans mon accord, c’était lors des photos de classe dans une manif’, une petit pose pour les RG, ça faisait partie du folklore. Sinon, jusqu’à l’an dernier, il existait très peu de photos de moi, moi-même je n’en avais aucune. D’abord parce que je m’en foutais, ensuite parce que je n’aime pas ça. Je n’aime toujours pas ça mais je ne m’en fous plus – ça m’énerve.

    C’est beau, deux personnes sur le point de s’embrasser. Mais ce n’est pas l’image qui est belle, c’est l’énergie qu’ils dégagent, la vie qu'ils créent. La scène leur appartient, un voyeur peut en profiter sur l’instant, mais une photo, c’est idiot.

    Alors que venait-il faire, ce petit paparazzi de mes deux, à allonger son bras pour fourrer son téléphone portable entre deux visages qui ne regardaient qu’eux-mêmes ? Sans doute ne le savait-il pas lui-même, avec son sourire niais de blaireau bourré. Sans doute un réflexe, histoire d’aller mettre le lendemain ses photos sur Flickeur pour se prouver qu’il avait passé une bonne soirée.

    Donc oui, petit con, c’était une très bonne soirée. Sauf à ce moment où tu m’as fait repenser aux RG, aux caméras de surveillance, aux touristes japonais et aux concerts de rock devant une armée de téléphone branchés en mode vidéo.
    Une excellente soirée où j’ai compris que oui, vraiment, Big Brother, c’est nous.

  • Eternité de la tendance

    Après avoir lu pour la dixième fois le mot "tendance" sur la plage de surf où je bronzais hier soir, j'ai arraché la prise de mon modem.
    Puis au creux d'une vague d'un livre je suis tombé sur cette citation.

    "A la lettre nous fleurions le vent avant qu'il eût passé la frontière, parce que nous vivions constamment narines tendues. Nous trouvions le nouveau, parce que nous voulions le nouveau, parce que nous avions faim de quelque chose qui nous appartînt et n'appartînt qu'à nous, non au monde de nos pères." (Stefan Zweig, Le monde d'hier)

    Zweig parle ici de Vienne au début du XXe siècle, où l'impasse politique ne proposait comme recours que "la fuite dans l'art ou dans l'intériorité".
    Peut-être que tous les débuts de siècle se ressemblent, finalement.