Elle détestait Gombrowicz et aimait EE Schmitt, mais par ailleurs elle était parfaite.
Il restait deux heures avant de la revoir, une heure avant la fermeture des librairies, je suis entré dans la plus grande d’entre elles.
Nicole Krauss n’était pas là mais JS Foer traînait en un exemplaire, déjà un peu fatigué. Schmitt tenait un rayon entier. Et Lévy, et Nothomb, mais aussi Carrère, Joncour, Fournier, Hatzfeld.
J’ai demandé à une des libraires si Philippe Jaenada était traduit en polonais – il ne n’était pas (scandale). Martin Page, lui, l’était. Vous avez de la chance, m’a dit la libraire, il reste un exemplaire de "Comment je suis devenu stupide" ("Jak zostałem głupcem", en vp). Alors elle m’a montré, sur la droite, un étrange rayon organisé comme une pièce montée.
- Vous le trouverez quelque part là-dedans.
J’ai commencé à fouiller. Il y avait là des livres de cuisine, des mémoires, des romans venus d’un peu partout, pour certains en dix exemplaires, rangés dans un ordre aléatoire. Jamais je n’avais vu autant d’auteurs français dans une librairie étrangère. Grimbert, Graff, Frèches, Deghelt, Morgièvre, Besson, Djian, Curiol, Richard Millet en vrac à côté de Nicolas Fargues, Beigbeder. Il y avait même des noms que je n’avais jamais entendus : Astrid d’Ozan, Thierry Leget, Stéphane Jougla, Sébastien Ortiz.
Mais pas de Martin Page. Je suis retourné vers la libraire, de nouveau elle a consulté son ordi. Il n’y a qu’un seul exemplaire, ça va être compliqué de trouver…
Elle est venue m’aider, c’est alors que j’ai vu le panneau qui pendait au-dessus du rayon.
(enfin un mot polonais facile)
- Dites, ça vous arrive de vendre des livres d’auteurs français ? j’ai demandé.
Elle a ri.