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Second Flore - Page 14

  • Que lire après Charlie ?

    andric, larher, charlie, pourquoi le romanHier, ce parfum [choisis ici ton adjectif] de retour à la normale. C'est dans la nature des choses. Et pour beaucoup, cette question aux contours encre un peu flous : et après ?
    Après, il y a les résolutions qu'on peut prendre, là maintenant, alors que le corps est encore chaud et garde toutes les traces, sans quoi elles finiront aux oubliettes et tout ça n'aura servi à rien.
    Et puis il y a la vie qui a repris, déjà, avec ses questions quotidiennes encore marquées par la semaine passée – par exemple : que lire après ça ?

    Parce que nous sommes probablement beaucoup, à avoir eu un roman en cours mercredi dernier, et à ne pas avoir avancé depuis.
    Pour ma part, je lisais Le pont sur la Drina, d'Ivo Andric. J'avais entamé une première fois le livre après être allé à Belgrade, en 2002. J'en avais lu cent pages, puis j'avais oublié le livre dans un café et ne l'avais jamais retrouvé. Jamais racheté, non plus, jusqu'à ce que C. (merci éternel) ne me l'offre à Noël.
    C'était étrange, de reprendre ce livre, plus de dix ans après. Hormis une scène de pal douloureusement réaliste, je ne me souvenais de rien. Absolument rien, alors même qu'Andric est un conteur génial, avec un style limpide, le recul historique et la connaissance des hommes – le genre de livre qui vous fait penser que le prix Nobel (qu'Andric a eu en 61) sert vraiment à quelque chose.
    Bref ! Je lisais, donc, j'admirais, et en même temps je m'interrogeais. N'avais-je rien compris au livre, il y a dix ans, pour m'en souvenir si peu ? Et puis cette autre question plus générale : à quoi peut bien servir un roman si l'on ne s'en souvient pas ?
    J'ai voulu me rassurer en me disant qu'il reste toujours quelque chose des grands livres qu'on lit. Que l'histoire peut s'effacer de notre mémoire consciente mais que tout ce qui nous a frappé sur le moment reste là, quelque part, dans un coin oublié du cerveau, que tout ce qu'on lit nourrit notre intelligence du monde, et des autres...

    Puis on a attaqué Charlie Hebdo, tué une policière, assassiné des juifs et vandalisé des mosquées, je n'ai plus pensé à tout ça et aujourd'hui, alors que je lis sur facebook reprendre les débats stériles et les procès d'intention (la suite de la Société du spectacle, au fond, qui intègre désormais les spectateurs dans les gradins d'où ils peuvent (nous pouvons) hurler, huer et applaudir), aujourd'hui ça me revient soudain.
    Je sais de nouveau pourquoi je lis des romans. Et je crois même me rappeler à quoi ils servent.

    Le roman nous aide à voir le réel qui se cache derrière les postures et les simulacres - le réel tel qu'il est : compliqué, imparfait, parfois pathétique et parfois merveilleux, presque toujours contradictoire, à la fois branquignole et froidement efficace comme les frères Kouachi. Le roman nous apprend à comprendre l'autre, à se mettre à sa place, à intégrer son point de vue. Je ne dis pas que les romans font la tolérance, mais ils la nourrissent. Je ne dis pas non plus que les livres seraient la seule réponse. On connaît de grands lecteurs bornés comme des routes nationales, tout comme il existe des bourreaux mélomanes. Les livres sont des gouttes d'eau dans l'océan, mais ils rendent tout de même le monde un peu meilleur.

    Alors oui, se remettre à lire après cette semaine. Délaisser l'écran pour un fauteuil, un café, le métro. Des romans, n'importe lesquels. A en écrire aussi, le temps de retrouver l'envie – même si là, tout suite, si tu me demandes, je préférerais être nu dans un lit avec toi.

    … Et donc bientôt, pour toutes ces raisons et en attendant de finir Andric, je vous parlerais bien d'Entre toutes les femmes, d'Erwan Larher, histoire de revenir au cours de ce blog.
    Je rassemble mes idées et je reviens.
    ..

     * NB – si j'osais je dirais qu'il en va de même sur le plan politique. Si Hollande n'annonce pas dans les jours qui viennent (au-delà des mesures bricolées à la hâte) des orientations, des vraies, basées sur la fraternité et pas seulement sur la peur, eh bien on n'aura que la rhétorique guerrière et la réponse policière, on bricolera comme on sait faire sur l'éducation et la justice et on fera semblant d'avoir un Grand Débat national pour savoir s'il faut travailler six ou douze dimanche par an. Mais ne désespérons pas encore complètement.

  • Nation

    … Et jeudi avait été belle, tout en fraternité discrète. Dans la tension des prises d'otage, vendredi nous avait ramenés à notre condition de spectateurs et l'optimisme de mercredi faisait place à une vague nausée.

    569212_928138-FranceCrowd6.jpgCe dimanche, d'ailleurs, la matinée avait commencé derrière l'écran à voir se déliter les réseaux sociaux dans de bien tristes débats. Etions-nous Charlie ou pas ? Avions-nous envie ou non de défiler avec Orban et Netanyahou ?

    Et puis on s'est dit qu'on irait sans se poser de question, juste pour les noyer sous le nombre, faire corps. Et la foule était sage parce que parfois, vraiment, c'est le peuple le plus sage.

    11-1.

     

  • République

    img-4676.jpgJe n'avais pas envie d'aller place de la République. Je crois que j'avais un peu peur de ce que j'y entendrais, de m'énerver alors qu'il n'y avait qu'à, laïquement, communier.

    Finalement je m'y suis retrouvé – merci E. et F. de m'y avoir entraîné. Juste être là, faire nombre, et partager. Le choc. Ce que ça remuait en nous. Ce que ça nous inspirait. Et la suite, alors, et l'avenir ? Même s'il était encore trop tôt.

    Et pour une fois je me retrouvais dans le rôle de l'optimiste. C'est que, Répu ou pas, on l'a senti ce sursaut, en nous et chez les autres, ce truc collectif dans la façon dont entre nous on parlait de l'événement, sur la toile ou en se prenant dans les bras. Le sarcasme n'avait plus de place, personne ne jouait plus à qui ferait le meilleur mot sur l'événement, cette fois c'était collectif, ça nous dépassait et on avait seulement envie de partager. Dans un café, un seul type a essayé de faire des phrases, on l'a vite envoyé chier. Gentiment.

    Sur l'attentat lui-même, pas de mot, ils sont tous là dans la rue, on se les passe comme ça, pour parler, pour être ensemble.
    Sur le sursaut, j'en ai quelques-uns. Un espoir, un peu fou mais réel. L'espoir que cet élan collectif nous marque comme nous marque l'attentat.
    Parce qu'on l'a tous senti, que tout ça allait plus loin qu'un symbole et douze morts.
    Qu'on avait fini de rire, en gros, qu'on n'avait vraiment plus le droit de faire les malins et que ça durerait plus que les trois jours de deuil. Eh bien tant mieux. Que le sarcasme reste où il est, profondément enterré, et qu'on revienne au premier degré, à l'essentiel : la joie, le partage, l'attention à l'autre une fois l'émotion retombée. Qu'on revienne à la politique, aussi, en s'appuyant sur le choc d'aujourd'hui pour poser les vraies questions, bannir les postures et les petites phrases, être sérieux pour avoir le droit de redevenir joyeux.

    Sur facebook, juste après la nouvelle, un ami a ressorti cette phrase du premier ministre norvégien après le massacre d'Utoya : "Nous allons répondre à la terreur par plus de démocratie, plus d’ouverture et de tolérance".
    Puisse-t-il être entendu. Soyons fous, on a le droit d'espérer des actes, et pas seulement policiers. Parce que nous les aurons, les mesures policières, dans les mois qui viennent nous accepterons collectivement des mesures que nous aurions honnies voilà dix ans. Mais on a le droit d'espérer que dans l'onde de choc puissent passer d'autres actes – allez, au hasard et divaguons, le réinvestissement des banlieues, une vraie taxe sur les transactions financières, une Constituante... Bref. Espérons, et faisons en sorte que ça puisse arriver. Que les lobbies se taisent un instant comme s'est tue l'ironie, qu'on se dispute sur des choses qui en valent la peine, en ayant conscience qu'on a quand même bien de la chance de pouvoir s'engueuler.

    Voilà, il y avait un peu de ça, ce soir, place de la République et autour. La dernière fois que j'avais trouvé la place dans cet état, c'était le 21 avril 2002. On sait comme ça avait fait long feu.
    Mais là...

    Dans le métro un jeune type, afghan ou pakistanais, qui avait pris un exemplaire de 20 Minutes par terre et qui essayait de le lire en se concentrant, parce que c'était ça sa vie, ici et maintenant, essayer de parler le français et de le lire.
    J'ai passé cinq minutes en face de lui, je me rendais à quel point ils nous ont tous pollués, les discours haineux et statistiques sur l'immigration. Ce jeune gars était du côté de la vie, de l'espoir, mettons-nous de son côté, chacun et ensemble. Ça ne m'arrive pas souvent mais aujourd'hui j'ai envie de parier sur le meilleur. Mais il faut commencer tout de suite, alors, et ne pas s'arrêter.
    Fini de rire, commençons autre chose.
    Salut.

  • Paulina 1880

    Jouve-Paulina_1880-Folio_1974-Photo_Film-493.jpegPaulina est jeune. Paulina est belle. Paulina est intelligente, c'est la fille chérie d'une riche famille, oui mais voilà : Paulina vit en Italie au XIXe siècle, et les jeunes filles appartiennent d'abord à leur père, à leurs frères, et à ce Dieu que Paulina prie plusieurs heures par jour.
    Mais un été surviennent les premiers émois, et arrive dans la maison familiale le conte Cantarini. Il est marié (à une femme malade), il tombe amoureux, elle aussi. Rendez-vous secrets, désir et découvertes, culpabilité, Dieu, le sexe, la société, la vie.

    Paulina croissait en violence et en esprit souterrain. A treize ans elle avait sa vie intérieure. Pour prier Dieu elle s'agenouillait ou même elle se couchait entièrement, à demi nue, sur le pavement froid en hiver dans la chambre nord. Le vent qui passait sur son jeune corps l'épouvantait et l'exaltait au plus haut point, elle imaginait alors tout ce qu'elle devait donner au Seigneur et désirait trouver en elle des souffrances plus pures, okus belles, plus atroces qu'il serait doux de lui offrir.

    Evidemment, Paulina 1880 n'a rien d'une romance. C'est un grand roman. De ceux qui vont jusqu'au bout des sentiments et des sens, souvent à la limite (elle est ténue) entre le génie et le ridicule, et toujours du bon côté. Du genre dont on admire la précision et le style, seulement pour se rendre compte que le style n'est que la manifestation de l'intelligence de l'auteur, une intelligence qu'on imagine nourrie par les années, toute la sagesse de l'expérience...
    … Avant de se rendre compte, en tombant sur la bio de l'auteur, qu'il avait tout juste notre âge quand il a publié ce livre. (soupir)

    A quatre-vingt-huit ans de distance, toute mon admiration, M. Jouve.
    Et merci à toi, Paulina 2015.

    Marine Riguet, j'écris ton nom ^

  • ... à la récré.

    Alors qu'il semblerait bien que cette année 2015 soit la dixième où l'on blogue par ici, la maison s'engage à ne prendre strictement aucune résolution.

    Mais derrière son comptoir, avec sa barbe et quelques notes à venir bien cachées sous l'évier, le tenancier vous transmets ses vœux les plus réels, et vous souhaite, entre autres, quelques belles surprises et un zeste de romanesque.

    A bientôt

    113901252.jpg

  • Carte postale du bout du monde (4)

    J'allais enfin écrire la suite de cette saga des blogueuses littéraires, il y aurait eu de la joie, de la romance et un zeste d'ironie mordante, et puis finalement...

    Salutations de l'auteur absent de Paris, comme on di(sai)t

    plage, grêle, mouettes, ah c'est bon

    (oui, N°5 est en route)
    (et non, il n'a pas neigé)

  • Arab Jazz

    Minuit. La ligne 4 remonte vers le nord, mes deux voisins descendent lentement la canette de 8°6 qu'ils se partagent. Le type assis à côté de moi est un simplet qui parle trop fort ; l'autre a la tête ronde et l’œil malin, il laisse brailler son compagnon de beuverie, placide et débonnaire. J'ai mon livre à la main, j'écoute vaguement comme on écoute dans le métro, une demi-oreille branchée sur le duo.
    En bout de ligne, un mot finit par me faire rire, regards, salut, la porte de Clignancourt arrive, tout le monde descend, bonne soirée.
    Mais en haut de l'escalator, Placide m'attend. Il tient à me parler tandis que Simplet achète un kebab.
    C'est que ça lui fait plaisir que j'aie ri à sa blague, me dit-il. Mais ce qui lui fait le plus plaisir, c'est que je lise un livre.
    - Ça veut dire que pour vous faire croire des salades, faut se lever tôt, hein !
    Et voilà. Abdel, fier français berbère quinquagénaire, commerçant à Grigny en goguette à Clignancourt vent de trouver une des plus belles justification de la littérature. Vous autres qui préparez des colloques ou des livres entiers sur le sujet, vous pouvez vous recoucher.

    Un quart d'heure plus tard, Placide et moi connaissons nos parcours et nos cafés respectifs (bon, surtout les siens), nous nous serrons la main pour la dixième fois, Simplet a fini son kebab, salade tomates oignons, il lui tarde d'aller se payer du bon temps avec son copain Abdel, lequel soupire et cligne de l’œil. Cette fois j'y vais.

    Une minute plus loin, j'arrive devant chez moi, un groupe de quatre blancs-becs tape la discute, bières en main, voix qui se baissent quand j'approche, je crois comprendre qu'ils hésitent à sauter la grille pour aller pisser tranquille dans le parking de l'immeuble. Je passe l'angle, j'en vois un qui prend son élan. N'y pense même pas, je dis. Le gars recule.
    Vingt minutes plus tôt, sûr que j'aurais laissé faire en pestant dans ma barbe. La littérature ne peut pas tout, je sais que j'ai parlé comme l'aurait fait Abdel, que c'est lui qui m'a donné cette assurance que j'ai surprise dans ma voix. Hop.

    ob_3a2ca2_arab-jazz.jpg(au fait, le livre : Arab Jazz, de Karim Miské. Un polar made in XIXe (arrondissement), et bien plus qu'un polar. Rythmé, intelligent, une plume vraie et pas de faux mystère, que demander de plus ? Il y a de l'Abdel dedans, allez-y voir.)

  • Le Puits était profond

    product_9782207117682_195x320.jpgOn m'avait prévenu que ce livre n'était pas désopilant, c'est à peu près tout ce que j'en savais. Ah, si : on m'avait dit aussi qu'il était court (111 pages, excellent calibre), et qu'il était bon. Ça suffisait, finalement. Et il avait fait son chemin jusqu'à la table de mon libraire, où les places sont chères.
    L'avantage des romans courts, c'est qu'ils ne tardent pas à aller au fond des choses. Ici, dès la première ligne.

    - Impossible de sortir on dirait, dit-il. Puis il ajoute : Mais on sortira.
    (Ivan Repila, Le Puits, p.1)

    Ce sont deux enfants ('le Grand' et 'le Petit') coincés au fond d'un puits. Ensemble ils s'organisent pour la survie quoiqu'il semble improbable qu'ils en sortent vivants – en tout cas pas tous les deux. Ils ont froid, ils ont faim.
    Dans un coin, un sac de provisions mais le Grand défend d'y toucher – c'est pour maman, dit-il. Mais on ne sait pas vraiment où est maman, ni qui elle est, si qui sont ces gens qui parfois se penchent en silence sur le puits. C'est la grande force de ce roman, d'ailleurs. On n'y explique rien, quelques indices tout au plus, et la plupart des mystères resteront entiers, à moins que le lecteur ne trouve lui-même la clé. Je pense en avoir trouvé une mais là c'est moi qui ne vous dirai rien, vous m'en voudriez. Une clé en forme de métaphore, métaforte mais qui n'explique pas tout – et tant mieux, au fond, ce serait plus décevant qu'autre chose.

    Ainsi donc, au fond de leur puits, les deux enfants luttent contre la folie, le Grand tente d'en préserver le Petit à qui il promet la sortie tout en mangeant systématiquement la plus grande part de la maigre nourriture qu'ils parviennent à trouver. Et parfois, il le prépare à la vie dehors.

    - Quand on sera là-haut, on fera une fête.
    - Une fête ?
    - Oui.
    - Avec des ballons, des lumières et des gâteaux ?
    - Non. Avec des pierres, des torches et des potences.

    Le Puits a la force d'un grand conte – du genre qu'on n'oublie pas, dont on ne perçoit pas immédiatement le sens caché mais auquel on sait qu'on repensera, un jour, sans préavis. Quand je pense que l'auteur est plus jeune que moi, je suis un peu jaloux, j'avoue. Quand je lis que c'est son premier roman publié, je suis admiratif. Et quoi qu'il en soit, je suis surtout content de l'avoir lu. Alors oui, je vous préviens : ce n'est pas désopilant, mais c'est profond, et c'est bon, très bon.

    Sur ce, je pense que j'en ai bien fini avec cette Rentrée – étrangement je crois que je n'aurai jamais autant lu de livres de septembre. J'ai une bonne envie de classiques, on en parlera peut-être, ou peut-être pas. La Toile veut parler de moi, paraît-il, il est grand temps que je mette les voiles.

     

  • Le caricaturiste et le cireur de pompes

    9782021139181.jpgJe n'aime pas beaucoup les citations dans les critiques de livres. Elles rendent rarement justice à leur auteur quand on les sort de leur contexte – à moins de valoriser le sens de la formule, bien sûr. Mais la recherche de la formule plombe bien assez comme ça la production romanesque française, je trouve.
    Heureusement, Juan Gabriel Vasquez, tel l'impossible, n'est pas français. Aucune recherche de petite-phrase-qui-fait-mouche dans ses "Réputations", que de l'intelligence, de la précision dans le mot et la pensée, et une construction simple et parfaite.

    L'histoire ? Simple. A Bogota, un caricaturiste politique du genre inflexible est sur le point de se faire décorer pour l'ensemble d'une œuvre qui lui a pourtant valu moult inimitiés par le passé. Le soir-même, un fantôme resurgit, et le doute s'installe. Je n'en dis pas plus, je déflorerais. Et puis pour une fois, je laisse parler l'auteur. Deux extraits, je vous promets que le reste est du même tonneau.

    "Depuis quand les cireurs du centre-ville avaient-ils des horaires fixes ? […] Mallarino avait changé, les cireurs aussi. Il n'allait presque plus en ville et avait pris l'habitude de regarder le monde sur des écrans et dans les pages des journaux [...] à croire qu'il estimait que son mérite l'y autorisait et qu'à présent, après tant d'années, c'était à la vie de venir le chercher."
    (J-G. Vasquez, Les Réputations, p. 15)

    "La vie est le meilleur caricaturiste qui soit […] Ceux qui comprennent ce que je veux dire savent que je ne parle pas seulement de particularités physiques, mais de la trace mystérieuse que laisse la vie sur nos traits, du paysage moral, oui, je ne vois pas comment le qualifier autrement, du paysage moral qui se dessine peu à peu sur notre visage à mesure que la vie s'écoule et qu'on commet des erreurs ou qu'on voit juste, à mesure qu'on inflige des blessures ou qu'on s'efforce de ne pas le faire, à mesure qu'on ment, qu'on trompe ou qu'on persévère, parfois au prix de grands sacrifices, dans la tâche toujours ardue qui consiste à dire la vérité. Merci beaucoup." (p.55)

    De rien.