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Cartes postales - Page 6

  • Cartes postales du bout du monde (2)

    Au bout du monde les gens se saluent quand ils se croisent.

    "Alors on travaille ?" me demande un beloteur qui vient fumer sa clope sur terrasse la terrasse fraîchissante.
    Je travaille, ou, sur une sorte de conte.
    - Un conte pour enfants ?
    - Non, pour adultes.
    - Ah ouais. Dis-donc. Et ça parle de quoi ?
    Alors je raconte, un peu.
    - Eh ben. C'est pas ma came, mais si vous devenez millionnaire, vous viendrez me payer une bière !
    Je viendra, oui - mais on aura fait pas mal de belotes avant, je crois. On continue sur autre chose, il écrase sa clope dans le grand cendrier.
    - Bon, ben, bonne chance hein !
    Bonne chance, oui. Merci, gars. 

  • Cartes postales du bout du monde (1)

    On commencerait juste par cette image – le bout du monde en février. Une plage, un ciel bleu malgré le froid, personne aux alentours, la mer au loin (très loin) à marée basse, et entre les bâches des pieds qui sentent la liberté et qui, tout en gardant le pas léger, écrasent avec délectation des coquillages sur le sable dur.
    Dur.

    Petit à petit on se rapproche de la mer, le bruit des vagues vient crescendo – le bruit des vaguelettes, surtout, tout juste bonnes à créer des sensations pour un Playmobil surfeur.
    Les vagues, donc.
    Au bout du monde on se rend compte de choses essentielles que la ville noie sous ses impératifs productifs. Par exemple, que l’homme n’est pas le seul animal qui aime jouer dans les vagues au bord de l’eau. Il y a aussi de petits oiseaux blancs, comme des mini-mouettes qui se rassemblent en colonie pour courir avec leurs mini-pattes en lisière de mer, s’amusant à défier les vaguelettes qui viennent mourir à leurs pieds. Quelques téméraires parviennent à rester sur leurs pieds en enjambant la vague, tandis que la plupart s’envolent en groupe, pour revenir l’instant d’après, au même endroit, pour affronter la vague suivante.
    On s’amuse d’un rien, au bout du monde.
    Et c’est bon.

  • Vacance(s)

    Allez, un petit dernier pour se sentir encore un peu loin…

    Le miracle des vacances se résume en deux images :
    1. Roissy, terminal C, un jeune type impatient passe quelques derniers coups de fil dans le hall de l’aéroport, lit le journal en regardant l’horloge murale à chaque fin d’article.
    2. Le même dix jours plus tard, dans un autre aéroport où on l’a convoqué deux heures avant le décollage. Il ne subit plus l’attente, il s’en fout. Il ne lit plus le journal, il est plongé dans un livre. Il ne regarde plus l’horloge, il regarde les gens.
    Voilà.

    Merci à Benoît Luciani et à David Lodge d’avoir accompagné mes deux voyages.
    320f7e827adbbfd9da5f943cdcfa8677.jpgBenoît Luciani a écrit Mise à mort – un parfait mini-thriller, plongée intelligente dans le monde du poker et qui ne se termine pas par un All-in retentissant où une quinte flush bat un carré. Mes vacances ont commencé à l’heure pile où, une daube hollywoodienne au-dessus de ma tête, j’ai sorti le livre de mon sac. Deux heures après, point final, sourire, Paris était loin et le portable éteint.

    1e429d5b36a893d6f569bc19ea702b3e.jpgDavid Lodge a écrit L’auteur ! L’auteur !  Henry James essayant de devenir auteur dramatique dans l’Angleterre victorienne, par un auteur très inégal, c’était un risque. Mais bien vacancé on prend souvent les bons risques. 500 pages d’affilée dans l’avion du retour (tiens, je vous en recauserai), merci M. Lodge.

    Mesdames et Messieurs nous allons maintenant entamer notre descente vers Roissy-Charles de Gaulle. La température extérieure est actuellement de…

  • Cartes postales de Montréal (3)

    Après l’art contemporain, Montréal surréaliste

    17/11 - Supermarché Metro
    Dans les rayons, une rangée de soupes Campbell attire mon regard. Hommage à Warhol, je m’arrête, en prend une spécial micro-ondes, repère une indication en encadré :
    "Mise en garde : le contenant et le contenu sont CHAUDS une fois chauffés"
    Sic.

    19/11 - Centre ville
    Une entrée de parking, et cette inscription :
    "Entrée réservée aux véhicules se garant sur le toit."
    Une ou deux fois par an, oui, je regrette de ne pas avoir d’appareil photo.

    20/11 – Parc Lafontaine
    Il a commencé à neiger sur Montréal, les lacs sont gelés, les parcs déserts… Quoique. Sur ma droite j’entends des cris, je lève la tête : personne. Ou presque. Car à vingt mètres de moi, abandonnées, huit poussettes de compèt’, genre 4x4 pour nourrisson, sont garées bien en rond. Les mamans sont un peu plus haut, dans la pente, c’est elles qu’on entend – elles font du step avec une coach survitaminée.
    Puis un coup de sifflet, bref, et les mamans retournent aux poussettes. Bien alignées elles font maintenant le tour du lac en levant haut les jambes – et une, deux ! crie la coach, et de temps en temps elles lâchent la poussette pour jeter les bras en l’air.
    La chorégraphie surréaliste est digne des premiers Avengers. Si on devait reprendre la série dans les années 2000, je nicherais une société secrète dans une salle de sport. Ou dans un cours de gym post-natale.

  • Cartes postales de Montréal (2)

    14/11 - Musée d’art contemporain
    Moins de deux jours à Montréal et je suis encore un peu français. Quand j’entre dans le Musée, j’ai encore en tête la dernière blague du Palais de Tokyo. En tête aussi ce détachement bien de chez nous, qui confond esprit critique et envie de critiquer.

    6e083606c529d017d9e41a932e364eba.jpg Mais autour de moi s’échangent des ondes positives – ces ondes étrangères qu’on ne saurait définir mais qu’on perçoit, fort et qui nous libèrent des préjugés étriqués. Il me faudra quelques minutes pour comprendre, et pourtant c’est simple : les gens ici sont venus pour être émerveillés. Les blasers sont au vestiaire, on se balade dans le musée avec l’envie d’aimer. Et (magique) on aime.
    Ma première carte postale sera donc signée Vik Muniz – un portrait tout en spaghettis et sauce tomate. Bon appétit.

     

    18/11 - Université McGill
    Depuis quelques jours j’ai l’impression que Montréal est une ville américaine qui parlerait français.
    Mais un soir par hasard nous voilà au milieu d’un petit groupe gouailleur au fond d’une librairie, des verres en plastique me racontent les derniers épisodes des Guignols et des yeux magnifiques me parlent de Pierre Michon.
    Le lendemain, ma balade sur le Mont Royal se finit dans une cafeteria de McGill. Dans la foisonnante presse étudiante, je lis les débats sur la grève étudiante en cours. Et j’apprends "qu’historiquement les étudiants francophones sont bien plus enclins à la grève que les anglophones."
    Il y a donc pas que la langue qui soit française ici.

    22/11 –UQAM
    Le dernier bus s’arrête devant l’université du Québec à Montréal. Au dernier étage d’un bâtiment, toutes les vitres portent une lettre – le bus s’éloigne vers l’aéroport, je peux lire : Ici nous résistons contre l’abandon du futur.
    Je ne connais pas le détail de leurs revendications. Mais c’est joli.

  • Carte postale de… Paris

    C’est une entrée de métro paisible, gare d’Austerlitz.
    Trois hommes squattent devant l’entrée, ils sont en treillis et ils s’ennuient. Le fusil en bandoulière, les bras ballants mais la rangers fière. Je me rends compte qu’avant de partir je ne les voyais même plus. Dix jours seulement et j’avais oublié comme elle est belle, la France d’après d’aujourd’hui.

    C’est une rame de métro comme une autre.
    Presque comme sa voisine, dont les affiches publicitaires lancent ce beau cri : "Devenez radin" (avec Price Minist*r) (youpi).
    Sauf qu’ici un vandale génial a soigneusement arraché les deux affiches. Et voilà qu’au-dessus de la tête des voyageurs se proclame en double ce slogan unique : DEVENEZ.
    Chapeau l’artiste.

  • Cartes postales de Montréal

    Comme d’habitude, je ne poste mes cartes qu’une fois rentré à Paris… En voici quelques-unes, dans le désordre.

    15/11, quelque part au Nord…
    Un morceau de banquise près d’une eau non gelée. Sur terre manchots se déplacent par petits sauts maladroits, manquent de tomber à chaque pas. L’un d’eux me fait ostensiblement la gueule, dos tourné vers le mur, nageoires tendues et tête relevée. C’est que ça a sa fierté, un manchot, quand on ose se moquer.
    En contrebas une bande de gorfous agités du bancal entrent dans l’eau avec autant de grâce que moi dans une piscine. Soudain l’un d’eux remonte à la surface… Une impulsion sous l’eau, un petit saut et hop ! il se pose au sol sur ses deux pattes, droit comme un I.
    Voilà une heure que je les regarde, deux groupes d’enfants émerveillés m’ont déjà dépassé. Tout à l’heure, à la boutique du Biodôme, j’achèterai des cartes postales (des vraies).

    19/11, Université de Montréal
    La cafétéria est à deux pas, je suis venu écrire au milieu des étudiants mais là, dans la neige, ce n’est pas une étudiante qui vient vers moi.
    L’écureuil est un animal curieux, il bondit dans la neige jusqu’au bord de la terrasse, se met sur ses deux pattes arrières et me fixe d’un œil craintif. Je soutiens son regard, je repense à ses cousins croisés hier au Mont Royal ("il est mignon le petit écureuil", me dit une petite fille et je suis d’accord avec elle, sur le même ton), je repense aussi à cette Montréalaise se plaignant des écureuils pilleurs de poubelles… Finalement au bout de deux minutes c’est moi qui craque. Impossible de défier un écureuil.

    20/11, supermarché Metro
    Le Québecois est un peu anti-américain.
    La Québecoise, elle, n’est pas anti-oxydants.

  • A l'intérieur

    J’aime sortir du cinéma aux Halles, la nuit - la colonne antique de la Bourse du commerce qui se profile au pied de l’escalator, puis Saint Eustache qui se détache et les rues vides où se finit le film dans nos têtes.

    Et puis samedi soir. Peu après L’heure zéro, j’ai croisé dans une vitrine un type de presque trente-cinq ans – sympathique et plein d'allant, hein, mais juste le genre de jeune type qu’on vouvoierait plutôt, c’est bien la première fois que ça me faisait le coup.
    La barbe, le manteau, la chemise, les cheveux, je ne sais pas ce qui faisait ça. J’ai vérifié dans la vitrine suivante, ce n’était pas aussi net mais quand même. Pas vraiment un choc, plutôt une surprise, plus amusante que dérangeante.
    A l’intérieur il y avait un gamin de vingt ans facétieux qui rigolait franchement : Dis-donc, gars, il est réussi ton déguisement, ce soir.

    Tout à l’heure j’irai chez le coiffeur.

  • And the Halloweener is...

    Mercredi midi. En haut de la rue, une petite colonie s’égaye en traversant.
    Une vraie colonie, cette fois : une cinquantaine d’enfants de 3-5 ans, de toutes les couleurs... et une demi-douzaine d’accompagnateurs avec des chapeaux orange.
    Un uniforme ? Mais non, couillon, c’est pire, c’est Halloween.

    En me rapprochant je comprends que ce n’est pas une chanson que la colo reprend en chœur, c’est un slogan. Je remonte encore, et j'entends :
    « On—veut—des-bon-bons ! On—veut—des-bon-bons ! »
    Les passants rigolent, la colonie en rajoute joyeusement.
    On—veut—des-bon-bons !
    Mais ce ne sont pas les enfants qui chantent - enfin presque pas. Ceux qui crient avec le plus d'enthousiasme, ce sont les profs accompagnateurs.

    J'en regrette presque de ne pas avoir eu de bonbon sur moi.
    Happy Halloween ;)